Eh bien, quelle ambiance! Elle trouvait vraiment la rue de plus en plus moche tandis que le nuage gambadait gaiement en s'éloignant des endroits ennuyeux, avant de soudainement s'arrêter. Alors qu'elle regardait derrière elle une voiture se jeter joyeusement sur la vitre du bar devenun triste, Mara se rappela soudain qu'il y avait quelque chose au milieu du nuage doré qu'elle câlinait depuis tout à l'heure. Elle leva les yeux, curieuse de voir ce que c'était. Ah, c'était juste un monsieur. Avisant son grand dos, elle se rendis compte que sa propre position n'était pas des plus confortables pour s'amuser et entreprit d'escalader l'individu, se hissant sur ses épaules malgré les vacillations de ce dernier. Elle plaça ses jambes de chaque côté du cou de l'homme et agrippa à son front, faisant attention à ne pas laisser tomber son poncho sur les yeux de sa gentille nouvelle monture.

Bon, il y avait une sacré vue de là-haut. L'enfant écarta les bras et partit dans un grand rire, amusée par le nouveau paysage qui s'offrait à elle. Puis elle plaqua à nouveau les mains sur le front du Monsieur au joli nuage, avant de perdre l'équilibre. Se tenant de la main gauche elle agitait le bras droit vers l'adorable petite bouteille de Bourbon qui voletait à côté d'elle depuis tout à l'heure, jouant à lui tourner autour en riant dans la joie et la bonne humeur.

Cependant, son regard fut attiré par un feu d'artifice devant eux et elle tourna son visage orné d'un sourire éblouissant. Le bouquet de lumière, à l'origine encore inconnue, avait eut lieu sur le sol plus loin et avait formé une magnifique gerbe ardente rouge et or, presque semblable à un large chêne aux couleurs de Gryffondor. Elle lâcha un petit hoquet émerveillée devant la beauté cramoisie du brasier végétale dont les vapeurs couleur nuage d'orage s'élevaient paresseusement dans les cieux blancs. Oui, les plus pragmatiques pourraient dire que cette incroyable rose de feu serait une simple explosion, mais ce mot de représentait pas suffisamment tous les sentiments engoués qui s'éveillaient dans le petit cœur de la fillette admirative.

Détournant avec difficulté le regard de cette oeuvre présentant les éléments symboliques de la Création et de la Destruction, Mara plissa les yeux pour apercevoir la silhouette d'un sympathique individu avançant fièrement vers eux, agitant comme une danse des feuilles de papier. Quand elle pu le voir de plus près, à une vingtaine de mètres d'eux, l'enfant se rendit compte que l'homme, portant fièrement une casquette et une veste de postier, ne portait visiblement rien d'autre. Il devait avoir froid aux cuisses pour l'instant mais bon, s'il voulait rejoindre la fête, même si les lieux y semblaient de moins en moins propices, la petite était sure que tout le monde allait l'accueilli les bras ouverts!

Un exclamation retentit derrière elle. Tournant la tête, elle se rendit compte que si devant, un gentil Facteur gambadait vers eux, de l'autre, un vilain Monsieur en costume transformait tout en trucs tristes et ennuyeux. Un curieux bruit claqua juste à côté d'elle. Elle tourna la tête lentement à sa droite. Sa bouteille de Bourbon volante. En bouteille de vin. Transformée. Par terre. La Voyageuse, occupée par un absolu sentiment de félicité, ne sut comment réagir face au terrible drame qui venait de se dérouler sous ses yeux.

Le monsieur au nuage d'or était tombé, entraînant la chute de la petite. Cette dernière roula par terre et se cogna contre une petite bouteille de vin dans sa roulade. En se relevant, elle secoua sa tête de droite à gauche pour faire tomber les gravillons et allait se relever, mais son regard fut attiré par un reflet sur le verre.

En reconnaissant la bouteille, elle tomba à genoux devant et approcha ses mains tremblantes de l'étiquette de Bourgogne 2005 millésime. Elle était trop choquée pour pleurer. Un simple petite bouteille ailée, innocente. Tuée, dans la fleur de l'âge. Qu'avait-elle fait? Rien. Elle était juste au mauvais endroit, au mauvais moment... Tuée par un rayon laser perdu, touchée dans l'étiquette. Il n'y avait même pas de résidus de plumes à côté pour prouver qu'elle avait eut des ailes par le passé.

Des petites ailes blanches qui l'avaient mené vers la liberté. Qui la faisaient voleter joyeusement tandis que l'innocente bouteille riait face au soleil levant. Elle avait une voix d'enfant. Peut-être avait-elle des parents, des amis, des frères et des sœurs inquiets de son absence. Un famille qui ne saura jamais ce qui lui était arrivé. Une famille qui ne pourra même pas retrouver son corps métamorphosé. Elle avait toute sa vie devant elle. Elle était heureuse, serviable, mignonne comme tout, curieuse et prête à découvrir le monde.

À présent elle n'était plus rien, juste une bouteille anonyme, perdue parmi tant d'autres... La fillette la saisit respectueusement et la prit dans ses bras, la serrant contre elle dans un dernier câlin plein d'affection et d'honnêteté. Relevant les yeux, elle marcha lentement vers le rocher le plus proche et posa délicatement la bouteille dessus. Prenant un bâton, elle traça soigneusement les lettres "R.I.P." devant l'hommage éphémère. Fermant les yeux en silence, elle se détourna gracieusement de la tombe, les cheveux dans le vent et les mains jointes contre son cœur, tandis que son poncho voletait tristement.

Elle marcha ainsi quelques minutes, ignorant le combat des deux fous et le nuage d'or transformé, qui lui paraissait bien gris maintenant. Une voiture était enfoncée dans un bar. Et alors? Blasée par la déprime, l'enfant ignorait tout ce qu'il se passait autour d'elle. Elle s'affala sur le sol gris, adossée contre le mur gris et regarda le ciel gris, tentant de se souvenir de sa petite bouteille aux ailes blanches, broyant du noir.

Pourquoi le monde était-il aussi injuste? Pourquoi était-elle aussi faible? Plus rien n'avait d'importance dans cet univers gris et sale. La seule chose qui empêchait l'enfant de mettre fin à ses jours en s'étouffant à coup de gravillons était le souvenir de la petite bouteille, qui voulait sans doute qu'elle continue à vivre malgré son sacrifice.

Spoiler:

HRP:

L'enfant déprimée se contentait de regarder d'un air blasé le chaos d'immeuble en mouvement, épargnée par un étrange miracle de leurs trajectoires malgré son absence de mouvement. Elle regardait les gens courir en criant, exactement comme dans n'importe quel film où des édifices se baladeraient sur leurs pattes. Son esprit se reconnecta avec la réalité quand une bouteille tomba d'un bar à côté d'elle, rebondissant dans un bruit clair avant de s'immobiliser à ses pieds. Elle la fixa, se rappelant de la petite bouteille ailée qui proposait à tout le monde de boire son contenu. Elle lui aurait sans doute proposé en ce moment, pour la consoler.

En sa mémoire, Mara décida de faire honneur à la bouteille, et se saisit du goulot pour le dévisser. Mais il se dévissait pas. Même alors qu'elle y mettait l'énergie du désespoir, il semblait comme soudé au verre. Jusqu'à ce qu'une pop-up surgisse de nulle part, flottant dans l'air devant ses yeux. La Voyageuse fatiguée la lut en diagonale, comprenant rien à cette histoire d'article 3342 ou quelque chose du genre, elle lut vaguement "18 ans" dans la question en gras à la fin, à laquelle elle répondit "oui", faisant disparaître l'image et dévissant le goulot comme par magie. La petite resta quelques instants indécise face à ce qu'il venait de se passer, se demandant si c'était vraiment bien, mais porta quand même la bouteille à sa bouche et en but une gorgée.

La vache, ça arrachait la gorge!

Mais nan, il ne fallait pas abandonner, il ne fallait pas pleurer, en l'honneur du défunt volatile! Elle avala une autre gorgée en grimaçant, puis en avala plusieurs de suite, espérant que ça passe mieux. Gni, ça faisait mal à la gorge... Nan, il ne fallait pas abandonner. Ne serait-ce que par fierté, ça serait une insulte d'abandonner cette bouteille ici! Un peu de courage, bordel! Elle se releva, titubant un peu sous le choc du changement de position, et but la liqueur à longues gorgées, ignorant les filets qui s'échappaient des coins de ses lèvres pour tomber sur son poncho. Voila, c'est comme ça qu'on boit de l'alcool! On est pas des tapettes, nous! Ah!

Se sentant prise d'une virilité aussi soudaine que bienvenue, la gamine se redressa fièrement, regardant l'horizon traversée par les buildings ambulants. Les regrets, c'est pour les femmelettes, les vrais, ils ne pleurent pas, il tatannent la gueule des ennemis pour se venger. Et elle allait se venger. Passant sa main des ses mèches folle pour dégager sa face de winneuse, la Voyageure avança fièrement, guidée entre les pattes de béton par une chance monstrueuse, s'approchant du combat qui opposait le taré au connard du fisc.

Mais une créature attira son regard. Jeune, mince, à moitié à poil et vachement bien foutue, elle faisait parti des seules personnes à ne pas courir comme des connes. Elle avait la peau pâle, les jambes longues et fines, sa belle chevelure lisse caressait ses épaules. Passant de nouveau la main dans sa tignasse, la battante s'approcha et déposa délicatement le bout de ses doigts en bas du dos de sa future conquête, regardant sa cible d'un regard de tombeur et frôlant sans crainte son seul vêtement, le nuage qui reposait sur ses hanches.

Elle s'approchait tranquillement de la demoiselle, préparant dans sa tête le discours qu'elle allait improviser pour la séduire, mais à peine fit-elle un pas que l'autre se déroba de ses doigts. La déception qui envahit l'enfant ne fit pas long feu puisque dans son mouvement, la belle créature était en train de se tourner vers elle. Oh bordel de Dieu... Elle fit un pas en arrière... Commença à pivoter légèrement, révélant la courbe de son bassin... Sa chevelure rouge s'éleva dans le mouvement... Oui, elle y était presque... de profil mais son bras était levé... Oui, presque... Oui! OUI, elle allait voir ses BOOOOO-

Ah merde, c'était un mec. Putain, fais chier, il faisait bonasse de derrière.

Qu'est-ce qu'il avait, là? Il avait l'air de flipper comme un con. La simple idée qu'elle ait faillit peloter un mec la dégoûta, et se rendre compte qu'il était toujours à moitié à poil et juste protégé par un nuage, ça arrangeait pas grand chose. Mais il avait vraiment l'air de flipper ce boulet, il venait lui aussi de se rendre compte qu'il avait un truc entre les jambes ou quoi? Elle n'en faisait pas toute une histoire, elle, merde.

Attendez... naaaaaan, il avait peur d'elle? Ah, le con. La Voyageuse en profita quand même, bombant le torse et commençant à allonger ses pas. Bordel, c'était quand même putain de gratifiant d'avoir un type mort de trouille à ta simple vue. Bon, le fait qu'il semblait mort de trouille à la vue de tout et n'importe quoi, dont les pochard affalés par terre, rendait l'image moins impressionnant, mais c'était déjà ça. La gamine boostée aux hormones commençait même à inspirer pour gueuler un "bouh" à la tête du gars quand un immeuble trébucha sur un Melchizedec de vodka et se ramassa comme une bouse juste derrière le trouillard. Malgré son audace virile, la petite sursauta, parce que fallait pas déconner non plus.

Et comme si l'aspect chelou de la scène n'était pas suffisant, un autre bâtiment se ramassa sur le premier, provoquant un carambolage de tous les diables autour des deux Voyageurs. Pas convaincue de sa longévité dans un tel environnement, l'enfant choppa le bras du type (il était fun, ça serait con qu'il meurt comme ça) et commença à courir pour chercher un coin plus safe. Et devinez quelle était la seule direction possible vers un potentiel coin safe? Ouaip, pile sur les deux tarés qui se démontaient copieusement à coups d'aléatoire et de logique.

Avouez, ça n'aurait pas été drôle sinon.