Cela faisait déjà plusieurs semaines que j’étais voyageur. J’étais heureux d’avoir vaincu ma phobie et mes relations dans le monde réel s’étaient grandement améliorées depuis. Enfin la vie devenait plus claire. J’avais repris la boxe et l’escalade et j’étais enfin en STAPS. Je m’étalais dans mon plumard après une journée éprouvante et ne trouvait pas plus de difficultés à m’endormir qu’à fermer les yeux.

Je les ouvris face au ciel, ou du moins, aux nuages et me rendis compte que j’étais étalé dans de la neige. Le contact mouillé et froid de cette dernière me décidait à me lever et par la même, regarder un peu autour de moi. D’abord je m’attardais sur mes habits, un jean bleu foncé, large et délavé ainsi qu’une chemise à carreaux rouge dont les manches étaient remontées jusqu’au coude. Ce fut ensuite le décor qui attira mon regard. Un village, pas un village normal, un seul village pouvait-il être normal à Dreamland ? Il se différenciait de tous les autres par son architecture, il semblait tout bonnement être entièrement composé de cristal. J’admirais quelques secondes, émerveillé par un tel décor. La blancheur de la neige reflétait la lumière qui perçait les nuages et les habitations semblaient rayonner aux couleurs d’un arc en ciel. J’avançais dans ce décor paisible et arrivait au centre du village ? Une place ou au milieu, toute de cristal, se tenait une magnifique fontaine formée de quatre bassins les uns au dessus des autres, du plus grand en bas, au plus petit, plusieurs mètres au dessus. Un jet d’eau était propulsé vers le ciel au niveau du quatrième bassin et le remplissait puis débordais dans celui du dessous et ainsi de suite. Une œuvre plutôt basique mais la transparence du monument ajoutait une touche de pureté à l’édifice.

Sur mon chemin je vis des habitants des rêves, grands et petits, en train de préparer la ville pour une fête. Les citrouilles, épouvantails et enfants habillés en fantômes m’indiquèrent sans trop avoir à réfléchir quelle était la fête en question. Tous préparaient Halloween, fête très appréciée des enfants pour les bonbons qu’elle leurs permet de manger. Les citrouilles commençaient dors et déjà à orner sombrement les fenêtres des habitations. La population était plutôt joyeuse, les décorations emplissaient les rues, des guirlandes reliant les maisons faces à faces d’un lien noir et orange. J’arrêtais parfois des badauds pour leur demander gentiment des informations sur la ville. Comme j’avais rien d’autre à foutre, c’était toujours ça à prendre. Je savais maintenant que j’étais dans le village d’Entartik, petite bourgade de la zone 3… Tout de même me disais-je, j’avais encore jamais rêvé aussi loin.
-Tu sens pas comme une drôle d’atmosphère dans le coin ? demanda Xivilius. Je sais pas, ça sent la merde.

-Venant de toi Xivi ça m’étonnes. Pourquoi tu dis ça ?

-Ouvre les yeux plus attentivement au lieu de t’émerveiller devant du cristal et des gens contents ! Et dire que y a pas si longtemps t’étais dépressif. T’aurais peut être dut le rester ?

-Tu m’en diras tant !

Je regardais plus attentivement les gens qui m’entouraient. Au premier regard on est de suite attiré par une atmosphère chaleureuse mais si on s’attarde un peu plus sur chaque personne, on remarque que certains sont plus tendus que d’autres, l’air triste ils regardent dans le vague et déambulent tels des spectres arrivés en avance à Halloween. J’accoste poliment un villageois et lui demande se qu’il se passe.

-Bonjour, je viens d’arriver dans votre village et je remarque qu’il y a ici des personnes assez mal en point émotionnellement parlant, s’est-il passé quelques chose de grave ?

Maladroit je sais mais à en juger par la réaction de Xivilius tout à l’heure et par l’air spectral de certaines personnes, je préférais aller droit au but et constater si au moins ma question le mettait mal à l’aise dans l’hypothèse ou il mentirait.
Il eut un léger tic de visage une fois ma question enregistré. D’un ton peu assuré il répondit :

-Et bien pourquoi dites-vous cela ? Certaines personnes ont la vie… plus dure que la votre, acceptez-le ! Il ne se passe rien ici, nous préparons une fête… restez au moins cette nuit.

Sa réponse n’était pas plus crédible que si K-Maro avait relancé sa carrière et était devenu le numéro un mondial des ventes de discs de rap. N’ayant rien de mieux à faire, je préférais aider les villageois plutôt que me tourner les pouces et fêter Halloween avec eux.

-Ecoutez, je me nomme Alan Stain, je suis voyageur, si il se passe quelque chose ici, dites-le moi, je peux peut-être vous aider ?

-Vous m’importunez Voyageur, je vous dis que nous préparons une fête un point c’est tout, si vous n’êtes pas intéressé, vous êtes libre de partir, au revoir.

Et l’homme s’éloigna d’une démarche assurée avant de disparaître à l’angle d’une rue.

Echec. Je me demandais s’il ne valait pas mieux explorer les alentours plutôt que cette ville mais je me ravisai à la vue d’une fille de mon âge. Une jolie fille. Ce qui avait arrêté mon regard sur elle, avant son physique, était sa tenue. Des bottes à doublure fourrée jusqu’aux genoux, ok, mais le short en jean tombant pas plus bas que le milieu des cuisses, le t-shirt que nous qualifieront de léger pour ne pas aller plus loin et la veste en laine me paraissait être une tenue de paumé plutôt que celle d’un gars du coin. Elle était debout droite, perdue dans ses pensées et sans doute aussi perdue que moi dans dreamland. J’approchais d’elle, avec un peu de chance s’était une voyageuse et nous pourrions croiser nos infos sur cet endroit. Qui sait ? Peut-être savait-elle se qu’il se passait ici ?
Elle était un peu plus petite que moi, dans la moyenne pour une fille, des cheveux longs et bruns tombaient dans son dos. Elle avait aussi de jolies formes qu’elle mettait d’ailleurs à son avantage grâce à ses vêtements et son visage harmonieux m’inspirait la sympathie.

Nos regards se croisèrent lorsque je m’approchais d’elle et j’engageais la conversation et, comme d’habitude, ne passait pas par quatre chemins.

-Salut ! Moi c’est Alan, j’ai atterris dans ce village et je suis un peu paumé. J’ai l’impression qu’il y a comme une atmosphère étrange ici, tu sais se qu’il se passe ?

Pas la meilleure façon d’accoster une fille mais au moins la plus efficace. J’allais pas parler de la pluie et du beau temps trois heures pour faire venir la conversation à ce sujet. Si elle me trouvait bizarre elle aurait qu’à m’envoyer chier comme le gars de tout à l’heure, j’avais rien à perdre.

Chapitre 1 : L’orphelin.

Je regardais fixement la jeune fille qui ne dit pas un mot. Le vent frais me fit frissonner et je me rendis enfin compte qu’être en chemise par ce temps, c’était pas cool. Je me consolais en me disant que tout cela n’était qu’un rêve et qu’après tout je n’avais pas vraiment froid. Je songeais à baisser les manches longues de ma chemise et me dit que finalement elles m’allaient mieux remontées. Je les laissaient donc en place. Mais franchement, je me les pellais quand même.
La demoiselle, alors que j’attendais comme un con et me prenait un vent au sens propre comme au figuré, ouvrit enfin la bouche. Elle l’ouvrit, c’est le mot. En effet elle n’ut le temps que d’ouvrir la bouche avant de disparaitre d’un seul coup sans crier gare. Elle devait avoir été réveillée de manière prématurée et me laissait ainsi donc dans cette merde tout seul, comme un grand !

"Ah ouais c’est con ça ! La simple vue de ta chemise de bucheron a dut la révulser et elle s’en est allée rejoindre la réalité pour s’assurer que ce n’étais qu’un rêve. Et là, tu fais quoi maintenant ?

-Et bien au lieu de lui poser des questions je vais trouver des réponses moi-même je suppose. Et merci pour l’hypothèse, j’adore.

-Mais de rien !"

Je m’en allais donc faire le tour du village.
Je déambulais au hasard dans la bourgade et repérais un peu mieux les lieux par la même occasion. Il y avait au centre du village la fontaine au milieu de la place principale. A l’Ouest, donnant sur la place, une église surplombée d’un clocher. La mairie était à l’Est. Autour de ce centre, les maisons étaient disposées un peu en vrac de manière non symétrique.

Tout en marchant je cherchais du regard ceux qui, malgré la fête n’étaient pas en train de s’amuser ou de rire. Je devais récolter des informations sur se qu’il se tramait par ici.
Je vis un enfant qui pleurait à chaudes larmes assis sur le pas de la porte d’une maison, la sienne sans doute. Je me dirigeais vers lui pour en apprendre plus.

"Salut, moi c’est Alan. Comment tu t’appelles ?

-Tommy… Maintenant laissez-moi !

-Est-ce que tu as besoin d’aide Tommy ? Je peux peut-être t’aider ?"

Le jeune homme qui jusque-là avait le visage caché par ses mains et la tête baissée me dévisageât.

"Vous ne pouvez pas m’aider ! Ils ont déjà essayé et personne n’a rien trouvé ! Que voulez-vous faire de plus ?! Qui êtes-vous d’abord ?"

Le regard que je vis dans ses yeux me percuta. Chargé de colère, les yeux gonflés et rouges d’avoir trop pleuré, ils semblaient prêts à verser des larmes de sang. Je ne vis de tels yeux que chez une seule personne, moi. Quand mon père mourut, mon regard était constamment chargé de la même rage de n’avoir rien put faire pour le sauver. Ce sentiment me rongeait tel un poison destructeur et inarétable. Aujourd’hui, le poison est toujours là mais mon corps s’est adapté et ne le crains plus. J’ai dus luter pour être la personne que je suis aujourd’hui, il faut qu’il en fasse de même.

"Et bien, je suis un voyageur.

-Un voyageur ? Alors retrouvez l’assassin de ma mère et tuez le avec vos pouvoirs ! Vous en êtes capable ! Hein monsieur ?!

-Je ne sais pas, mais en se qui concerne de le retrouver, je vais essayer. Sèche tes larmes Tommy et fais-moi voir l’endroit où ça s’est passé. Tu veux que j’aille voir ?

-Ok…"

Il se leva et ouvrit la porte de chez lui. La décoration de l’intérieur contrastait avec l’apparence extérieure de la maison, le cristal laissait ici sa place aux meubles en bois, et au cuir du tapis. Sur la droite il y avait la cuisine, en cristal. Il y avait, pour délimiter la cuisine du salon un bar en cristal recouvert sur le dessus de bois blanc. Le salon ensuite, était composé d’un tapis en cuir surmonté d’une table en bois. Contre les murs des étagères et une commode étaient disposés à plusieurs endroits  de la pièce. La cheminée en revanche, oui il y en avait une, était transparente et reflétait la lueur des flammes dans la pièce en divers petits rayons arc en ciel. C’était magnifique.
Je me raclai la gorge et posa la question fatidique.

"Raconte-moi tout." Il sécha ses larmes, se racla la gorge à son tour et commença lentement, sans doute se retenait-il de re-fondre en larme instantanément. Je ne le comprenais que trop bien.

-Ben, je sais pas trop en fait. Avant-hier, je suis allé me coucher à l’heure habituelle. Et hier matin en me levant, ma mère était étendue dans le salon… Il y avait du sang… " Ses yeux se remirent à larmoyer et il baissa la tête. Il reprit : "Les hommes du maire sont passés… après que je sois allé demander de l’aide. Ils ont fouillé la maison, inspecté le salon, ils ont nettoyé le sang sur le sol… et ils sont partis avec le corps de ma mère…

-D’accord, et ton père ou est-il ?

-Je ne l’ai jamais connu…"

Décidemment, ce garçon n’avait jamais eut de chance, pas de père, une mère qui vient d’être assassinée, orphelin à cet âge c’était dur à supporter. Mon poing se serra, la colère m’avait envahi et je devais l’utiliser comme une énergie dirigée vers cet assassin. J’en faisais une affaire personnelle, je ne voulais plus voir personne souffrir comme j’avais souffert, jamais.

"Ok Tommy, merci de m’avoir fait confiance, je vais continuer de mon côté et aller trouver celui qui t’as pris ta maman. Une fois que je l’aurais trouvé, je l’éclaterais."

Je lui frottai la tête et fis volte face, je sortis de la maison. J’étais en colère mais restais maître de moi-même, je repensais à tout cela. La mère de Tommy avait été retrouvée morte dans son salon, il n’y avait rien de cassé, elle ne s’était apparemment pas débattue. De plus, elle avait ouvert à quelqu’un en plein milieu de la nuit, la porte n’était pas cassée, les fenêtres non plus et le garçon n’avait été réveillé par aucun bruit parasite. Soit elle connaissait le meurtrier, soit il avait des capacités spéciales pour le meurtre en toute discrétion.
Après tout, dreamland est vaste et les pouvoirs sont nombreux. J’espère être à la hauteur.