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Où est Jenny ? [quête solo terminée]

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Nedru Etol
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Nedru Etol
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MessageSujet: Où est Jenny ? [quête solo terminée] Où est Jenny ? [quête solo terminée] EmptyMar 7 Aoû 2012 - 0:22

Le jeune homme rentra lourdement chez lui, un sac de course dans chaque main, une hanse passée autour de son poignet droit pour permettre à ses longs doigts de s’adonner à une tâche moins ingrate que de maintenir un sac alourdit par une grosse quantité de conserves. Ils trouvèrent la clef dans sa poche et s’empressèrent de la tourner dans la serrure de la lourde porte, avec un petit « clic » agréable à entendre. Il jeta ensuite les clefs dans un récipient placé non loin de la porte, puis profita de ce que sa main venait de regagner sa liberté pour appuyer sur une touche de son répondeur, non loin, avant de se saisir plus efficacement du sac. Il se dirigea ensuite dans la cuisine pour ranger les courses tandis que son répondeur lui récitait poliment le chant de son peuple:

-Vous avez (un temps trop long pour une simple virgule, juste trop court pour un point virgule, comme si la petite machine effectuait un rapide calcul mental) 2 nouveaux messages. Reçus aujourd‘hui à...

Nedru tendit l’oreille. Sur le premier ne s’entendait que le claquement bref de celui qui pose le combiné précipitamment. Insupportable. Le second, enregistré exactement six minutes vingt deux secondes plus tard, était plus exhaustif. Le même émetteur, sans aucun doute, qui avait mis de l’ordre dans ses idées. Sa voix restait incertaine; il lui avait fallu trouver des mots pour formuler une demande partiellement honteuse et il restait mal à l’aise. Le garçon était devenu coutumier de ce genre de messages.

-Bonjour…heu… Monsieur Etol ? Ici David Eddinks. Je vous appelle parce qu’on m’a dit que vous pouviez rendre des services du genre heu… recherche de trucs perdus, tout ça. Pas de cabinets ou de bureaux, discrétion garantie à tarifs raisonnables, je crois ? Bref j’aimerai que vous me rappeliez, j’ai un service à vous demander. Voilà mon numéro;

Après avoir dicté son numéro deux fois, un silence pesait quelques secondes, puis le dénommé David raccrochait. Un jeune homme, de l’âge de Nedru environ.

Car oui, entre ses études où il ne brillait guère par son assiduité, le jeune homme rendait ce genre de services. Pas réellement pour gagner de l’argent, plutôt pour se familiariser avec un milieu d’intrigues en équilibre précaire au bord du gouffre de l’illégalité. Pour se munir d’un carnet d’adresse intéressant, de contacts, de relations. Et enfin, parce que même si ses parents lui versaient des sommes tout à fait coquettes pour qu’il puisse survive agréablement dans son appartement londonien, il n’avait rien contre mettre de la marmelade dans le caviar. Le dénommé David, pourtant, n’avait pas l’air d’avoir à lui soumettre quelque chose de particulièrement intéressant. Il était trop jeune pour ça. Un contact qui n’était donc guère -à priori- intéressant en terme relationnel ou pécuniaire.

L’analyste du monde onirique composa néanmoins le numéro (il n’avait rien à perdre à appeler et la curiosité était son vilain défaut). Une voix de jeune homme lui répondit aussitôt avec empressement, avant la fin de la première sonnerie. Il jurait avoir les moyens de s’attacher ses services mais perdit quelques points en déclarant que la mission dont il chargerait l’enquêteur en herbe n’avait rien d’illégale ou malhonnête. Ils se fixèrent malgré tout rendez-vous devant une brasserie côtoyée principalement par des étudiants comme eux, ce même soir.

Les détails de la rencontre ne méritent pas d’être décrits avec un soin particulier mais l’échange dura assez longtemps, rythmé par quelques goulées de bières tièdes typiques et les regards paranoïaques que David lançait à la ronde aussi souvent que possible, pour le plus grand déplaisir du Gris. En résumé, David cherchait à retrouver sa petite amie qui avait disparue ou fugué. Le problème, c’est qu’elle avait déjà fui le domicile parental depuis trois semaines et était portée disparue. David l’avait en réalité cachée chez lui. Depuis qu’elle avait quitté son appartement à lui, (trois jours plus tôt) il l’avait cherchée partout, sans succès. Il ne pouvait se permettre de déclarer à la police qu’il l’avait caché sans s‘attirer des problèmes, aussi avait-il fait appel à la seule personne assez compétente et assez discrète qu‘il connaissait; Nedru, qui avait déjà offert des services semblables à l’un de ses « amis » (lequel n’était autre qu’un petit dealer de quartier).

L’histoire n’avait rien pour émouvoir Nedru, qui ne fit aucun effort pour laisser paraitre l‘inverse, mais l’étudiant en école de commerce promit une récompense alléchante. Et s’il avait besoin d’argent pour mettre à bien ses plans, il avait aussi envie de s’amuser un peu… La tâche n’était pas particulièrement difficile et le cas promettait la jouissance de tenir entre ses mains le destin de quelques individus. Nedru passait rarement à côté de ce genre d’occasions, surtout quand les individus en question avaient les moyens et (finalement) des relations douteuses parmi les dealers locaux.

Ils se séparèrent ainsi après avoir trouvé un accord; Nedru ferait des recherches aussi poussées que possible et fournirait ses résultats à David, sans promettre qu’il trouverait la fugueuse- une dénommée Jenny Boyer. En échange, David lui faxerait quelques photos ainsi que d’autres renseignements choisis et paierait une avance de la somme convenue. Fugueuse plutôt que disparue, oui, car David lui-même avait soulevé l’hypothèse, ce qui n’était pas innocent.

Le Renard reçut les quelques photos demandées dans la journée et contempla les clichés de Jenny toute la soirée, jusqu‘à une heure très avancée… Il ne voulait pas s’endormir avant elle. Son travail commençait maintenant.

~~~~~~


L’inconscient est une chose merveilleuse. Intrigante.. et vraiment merveilleuse, à bien des égards. Et cet inconscient semble être le moyen de transport emprunté par les Rêveurs dans Dreamland, dont-ils se servent pour se rendre dans des lieux qu’ils ont fantasmés, vus en photos, ou auprès de gens dont-ils ne connaissent pratiquement rien. Une photo leur suffit pour visualiser une personne en pensée, et rêver d’elle. Ils se trouvent alors auprès d'elle dans le monde onirique, quel que soit son statut , qu’ils s’en souviennent ou non. Merveilleux !
Nedru utilisa naturellement ce moyen de locomotion en tant que Voyageur, pour retrouver la personne disparue. Un inconscient plus très inconscient… Détail lexical. Toujours est il que; soit elle était morte et il ne la trouverait pas, soit il apparaitrait auprès d’elle dans le monde des rêves. Un modus operandi risqué vu la nature de Dreamland; Jenny pouvait aussi bien se trouver au milieu d’un lac de lave qu’au fin fond d’un océan… Mais si Nedru n’avait pas de talents de détectives particuliers dans le monde réel, seule cette capacité lui permettait de retrouver des personnes disparues avec efficacité. Il prenait donc le risque. Après tout, vivre consciemment dans Dreamland sans pouvoir en tirer d’avantages dans le monde réel était pour lui une absurdité…

Nedru « s’éveilla » ainsi dans un monde aussi bruyant que bondé, aux allures de grande ville américaine. Il régnait là un quelque chose de Broadway; des panneaux luminescents roses et jaunes se détachaient sur le ciel nocturne en affichant des noms de bars scandaleux en même temps qu’une surenchère de promesses de spectacles ahurissants.. Et des files interminables de badauds s’étiraient un peu partout dans le boulevard immense. Le garçon était partagé entre la nausée et l’amusement. Il aimait se mêler à des corps anonymes, à se dissimuler, observer, saisir au vol des parcelles de vies intimes, même au sein de populations jugées sales répugnantes par d‘autres. Et pourtant, ici, il se sentait plus dégouté que mêlé aux rebus d’une vieille ville; il avait horreur de la vulgarité et du mauvais gout (et s‘habiller au top de la mode n‘empêche ni d‘être vulgaire, ni d‘avoir mauvais goût) , les conversations qu’il interceptait étaient fades; il ne sentait aucune angoisse dans les intonations, aucuns secrets honteux, aucune supplique où le destin de vies se jouait… Un lieu aussi triste qu’une rue commerçante du monde réel. Mais tant pis, le travail passait avant tout.

Il chercha donc des yeux la jeune bécasse mais… ne la vit nulle part. Pourtant, elle devait être là ! Il ne se serait certainement pas trouvé dans ce genre de royaume via son propre inconscient, c’était obligatoirement l’expression d’un cerveau décadent, nourri aux émissions de télé-réalité dont le but inavoué était probablement de faire de la place dans le cerveau humain avant les pubs, le fantasme d’une gamine qui se veut femme alors qu’elle porte encore sur ses vêtements plus de strass rose que Barbie en personne ! Elle était tout près, forcément… Devant ses yeux défilèrent des dizaines de visages aux expressions diverses, de l’ennui à l’excitation en passant par le dégout pour ceux qui croisaient son regard glacial. Un regard aussi froid que les abysses, et guère moins sombre. Où se cachait-elle ? Il fendit la foule avec détermination, faisant se retourner sans ménagement toutes les rêveuses décolorées d’un mètre soixante dix environ qui se trouvaient là. Autant dire qu’il ne passa pas inaperçu. Mais il n’en avait cure; il n’était pas franchement là pour une filature au sens normal du terme, de toute façon. S’assurer que Jenny était bien en vie était sa priorité. Et il ne la trouvait pas. La diversité créature onirique/Rêveurs commençait à s’écarter sur son chemin et beaucoup de regards se braquaient sur lui, réprobateurs. Ses vêtements sobres et sombres juraient avec leurs accoutrements branchés et son attitude était pour eux et en ces lieux, effrayante. Il n’était pas dans un royaume aux mains d’un seigneur cauchemar; tous étaient là pour se divertir. S’il avait simplement appelé Jenny en criant dans la foule, il est probable que la rêveuse ne se serait pas approchée. Lorsqu’il en prit conscience, il confia cette tâche à une créature qui se trouvait là. Du haut de ses deux mètres quarante, elle affichait un air plus intrigué que désapprobateur et ses traits simiesques, aimables, trahissaient un caractère serviable. Ses yeux étaient écarquillés sur une question muette dont le point courbe était dessiné par un sourcil dressé. Nedru commença par s’excuser poliment et dissimula du mieux possible tout le dédain qu’il affichait habituellement. Naturellement, il était très doué pour mentir et afficha donc un sourire ravissant teinté d’une moue d’excuse.


-Excusez moi, je cherche une amie; Jenny Boyer. On s’est perdu…Vous pourriez l’appeler pour moi ? Ma voix ne porte pas assez et je ne veux pas plus effrayer tout ce joli monde. Dites lui qu’elle a gagné un prix, c‘est un truc entre nous, elle comprendra.

Il sourit, l’air penaud. La créature le dévisagea et cru certainement voir en lui personnage au cœur pur plein de bonne fois car il répondit avec bonté;

-Comment vous avez dit ? Jenny quoi ?
- Jenny Boyer.

Le singe grotesque s’exécuta dans l’instant; il cria ce que lui avait dicté le jeune homme d’un air joyeux en agitant ses bras trop grands au dessus de la foule pour attirer l’attention de l’intéressée, non sans avoir au passage placé sur son nez une paire de lunette de soleil violette. Nedru réprima difficilement un sourire victorieux qui lui aurait immanquablement donné une mine antipathique. Restait à voir apparaître ladite fugueuse. Mais les promesses de gains sont assurément une valeur sûre dans tous les mondes qui puissent être imaginés lorsqu’il s’agit d‘attirer l‘attention de quelqu‘un qui ne cherche pas à se montrer dans l‘immédiat. Cette hypothèse trouva une confirmation de plus cette nuit, tandis qu’une frêle jeune fille affublée comme deux milles autres dans le royaume (un sac à main Luigi Futon et la panoplie qui va avec) se présentait, pleine de feinte timidité. L’analyste avait à peine posé les yeux sur elle que, dès que son cerveau s’envoya à lui-même l’information selon laquelle il fallait porter une attention toute particulière à la jeune fille, son pouvoir s’activa.

Elle était impeccablement soignée, un fantasme qui n’est pas si courant quoiqu’en pensent les clichés. Son corps était mis à son avantage sans en oublier la moindre parcelle, de ses oreilles jusqu’au bout des chaussures en passant par les pointes soignées de sa chevelure. Les rêveurs pensaient généralement plus à leur environnement qu’à eux même… Sa façon de marcher trahissait une pratique de l’équitation abandonnée depuis quelques années tandis que sa posture indiquait qu’elle avait délaissé la danse très jeune; ne lui restaient que quelques automatismes assimilés très tôt et dont il est presque impossible de se défaire en grandissant. Une enfant gâtée, sans volonté. Le choix des couleurs de sa parure en disait un peu plus long sur son caractère; elle était une suiveuse, mais une suiveuse de près. La mode n’avait pas de secret pour elle mais elle ne prenait pas le risque de porter ses propres envies. Soit elle assumait parfaitement son manque d’originalité ou de goût personnel, soit elle restait modeste en profondeur. Tandis que Jenny croisait les bras d’un air innocent, elle divulgua sur le champ sa suffisance, son égocentrisme et par là même toute son hypocrisie latente. Peut être même un reflexe pour mettre en avant sa poitrine ?… Toujours est-il que le Clever Fox voyait tout, il apprit une quantité non négligeable d’autres informations intéressantes. Evidemment, le fait que Jenny ne porte pas des effets personnels et ne se trouve dans Dreamland qu’en tant que rêveuse posait des problèmes de « profilage » (comme on dit)  , mais le pouvoir semblait combler ce manque avec brio. Il parvint aisément à cette conclusion;
Jeune fille superficielle, hypocrite, attache une attention extrême aux apparences. Egocentrique, prétentieuse, QI certainement en dessous de la moyenne.

Dès l’instant où elle avait ouvert la bouche pour se présenter auprès du Donkey Monkey, une liste de qualités et défauts s’était incrusté dans son esprit, aussi clairement qu’une tribune de journal à sensation attire l‘oeil d’une l‘adolescente en train de s’offrir un cancer de la peau sur une plage. A chaque geste de la jeune fille, la liste devenait plus conséquentes et quelques corrections étaient parfois apportées. Elle ne pouvait rien lui cacher, s’en était presque effrayant.

Impressionnant. Et pourtant, malgré toutes ces informations, Nedru commit une erreur inqualifiable. Son interlocutrice était aussi prévisible et influençable qu’un enfant de huit ans, alors comment aurait-il pu se tromper ? Il avait oublié que son physique n’était pas particulièrement plaisant, et qu’il n’était pas dans un accoutrement particulièrement adapté pour ratisser de la jeune pétasse. La rêveuse n’était là que pour s’attirer les grâces de playboys en manque, certainement pour mieux les rejeter ensuite. Or, Nedru n’était pas apprêté pour une parade de jeunes coqs. De plus, la promesse de récompense s’était faite trop importante aux yeux de Jenny. Lorsque Nedru le comprit, il était trop tard. Il s’avança vers la rêveuse, un beau sourire aux lèvres, et se présenta sous un faux nom.


-Vous voulez quoi ? C’est quoi cette récompense ? une voix irritante, un ton suspicieux… Nedru comprit qu’il venait de trébucher et tenta vainement de se rattraper.
-Excusez moi, il fallait absolument que je vous parle. Il n’y a pas de récompense. Vous permett…
-Quoi ? Hey, mais ça va pas ? T’es qui d’abord ? Dégage vieux mec !

Elle avait osé couper le jeune homme dans son élan tandis qu’il s’apprêtait à lui saisir la main. Un affront odieux qu’il supporta difficilement. Il se ressaisit en déglutissant lentement et se força à un sourire charmeur un peu penaud. Son cerveau fonctionnait aussi rapidement que possible, mais le mal était fait. Il ne pouvait plus rattraper sa grossière maladresse. Jenny avait reculé vers le gorille avec un dramatisme exagéré et tous les regards étaient braqués sur eux. Il étouffa une pulsion meurtrière qui lui tambourinait dans la poitrine.

Tant pis. Il avait espéré pouvoir interroger la jeune fille en profitant de l’inconstance des rêveurs, du fait que ces derniers acceptaient d’avouer des informations dans Dreamland qu’ils n’auraient jamais confié ailleurs. Le tout était de scénariser suffisamment la rencontre; le rêveur se croyant dans une situation particulière où la confiance nait immédiatement (par exemple lorsqu’un inconnu vous sauve la vie au péril de la sienne, par simple altruisme) se mettait alors à table -avec plus ou moins d’appétit.

La situation ne s’y prêtait absolument plus, c’était trop tard pour cette nuit. Ne restait plus à l’analyste qu’à trouver un moyen d’échapper à la situation délicate dans laquelle l‘insulte à l‘intelligence qu‘était Jenny Boyer venait de le fourrer. Du coin de l’œil, il pouvait voir que le gorille à côté fronçait les sourcils d’un air inquiétant. Il n’était pas bien vu pour les Voyageur de se mêler aux Rêveurs. Il joua la carte de la surprise, reculant d’un bond en écarquillant ses grands yeux bleu-gris.


-Ah, mais vous n’êtes pas la Jenny que je connais ! On m’aura mal indiqué ! Désolé de vous avoir importunée ma belle. J’aimerai pouvoir me racheter mais hum… je vais me contenter de vous laisser en paix puisqu’il semble que je vous ai effrayée.

Il s’adressait plus à la foule réprobatrice qu’à elle en vérité. Tous n’étaient pas convaincus. Mais comme Jenny faisait volte face dans un reniflement d’exaspération et que le gorille s’excusait auprès de Nedru pour avoir plus ou moins causé l’incident (il dégoulinait de bonnes intention, c’était extraordinairement irritant) chacun reprit son activité initiale en ne portant bientôt plus d’attention à l’être encapuchonné qui s’éloignait aussi furtivement qu’une ombre entre des étoiles.

La nuit venait à peine de commencer, Nedru n’avait plus qu’à trouver de quoi s’occuper pour tuer le temps. Il suivit Jenny de loin, sans rien découvrir d’intéressant sur le caractère ou les occupations favorites de la jeune fille. Il savait déjà tout ce qu’il pouvait obtenir d’elle sans l’interroger. Malgré tout, il la suivit dans l’espoir de la voir croiser des individus qu’il aurait pu côtoyer par la suite dans le monde réel. Les probabilités étaient faibles mais il n’avait plus que ça a faire. En fait, cela ne lui servirai jamais.

Au réveil il aurait oublié tout ce que l’activation de son pouvoir lui avait révélé sur le caractère de la jeune fille (et ce n’était pas plus mal, il n’avait aucunement besoin de s’encombrer l’esprit par ce genre de considérations ) mais il n’avait rien besoin de retenir en particulier. Il n’avait pas pu l’interroger, se souvenir qu’elle était en vie lui suffisait pour commencer ses recherches.

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Nedru Etol
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MessageSujet: Re: Où est Jenny ? [quête solo terminée] Où est Jenny ? [quête solo terminée] EmptyMar 7 Aoû 2012 - 0:23
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Rien de vraiment concluant. Nedru tira néanmoins les enseignements de la nuit passée, méticuleusement. D’abord Jenny était en vie, c’était plutôt un bon point. Non pas qu’il s’en souciait particulièrement, mais il avait promis de communiquer des informations à David et l’assurance de la mort de Jenny offerte par le monde des rêves n’aurait pas pu offrir une donnée suffisamment… tactile. Par ailleurs, il savait qu’elle était en bonne santé. Séquestrée, en fuite ou kidnappée, il y avait fort à parier qu’elle n’aurait pas fait ce genre de rêve dans un royaume si jovial, où être habillé un ton trop sombre suffisait à inquiéter la populace. Elle avait très probablement trouvé refuge quelque part loin de tout soucis. Mais il se souvenait qu’elle lui avait paru stupide (même si les détails conférés par son pouvoir lui échappaient) aussi n’était-il pas à exclure que la situation dans laquelle était fourrée Jenny échappe totalement à la perception de cette dernière et ne l’empêche pas de faire de beaux rêves… Il écarta tout de même cette idée; il avait parfois tendance à sous estimer l’intelligence des gens normaux.

Bon, rester à procéder par élimination. Il lui fallait d’abord penser à des hypothèses de la plus à la moins probable, jusqu’au bout, et de les éliminer à la moindre trace d’imperfection. Il oublierait des points importants car son pouvoir ne fonctionnait pas ici. Mais il en avait tiré des enseignements et des techniques, tout de même, à force.

Ainsi, elle était allé se réfugier chez son petit ami, David. Pour une raison ou une autre, elle s’était encore enfuie -peut être s’étaient ils disputés et David avait omit de lui communiquer ce détail, cachant sa culpabilité, peut être. Mais sa seconde fuite relevait plus du caprice que de la peur ou de la présence d’un danger puisqu’elle n’était pas particulièrement traumatisée et selon ses estimations, en bonne santé. Elle s’était ainsi cachée, sûrement chez une amie intime (une parente aurait prévenu la famille) en attendant de retourner chez David après l’avoir fait languir et culpabiliser.

C’était ce qu’il y avait de plus logique compte tenu des maigres éléments qu‘il avait en sa possession. Dans l’absolu, aucune imperfection ne venait salir cette hypothèse au point qu’il l’élimine proprement et définitivement. Pour les parents, il n’était pas certain, il lui faudrait envisager l’idée plus tard au besoin. Pour l’heure, il lui faudrait donc chercher du côté des amies de la jeune fille avant de s‘encombrer d‘autres hypothèses plus ou moins farfelues. Les informations envoyées par David ne comprenait évidemment aucune liste des amies intimes de la fugueuse mais l’adresse de l’école Jenny était notée, il pouvait toujours aller y faire un tour. Il écarta doucement la couverture de son torse et se massa le visage avec les paumes.

Le réveil du jeune homme indiquait neuf heures et demie, il n’avait pas beaucoup dormi-heureusement au vu sa fin de sa nuit plus qu’ennuyeuse. Il se rendrait à l’école pour midi et demie, ce qui lui laissait trois bonnes heures pour se préparer. Ce dont il ne se priva pas. Il prit le temps de s’habiller consciencieusement sans omettre quelques signes extérieurs de richesse (pas forcément de bon gout, certain mais il voulait pouvoir approcher les amies de Jenny facilement, il avait retenu la leçon), se prépara un breakfast dans les règles de l’art puis sorti de son antre pour se frayer au monde. Il héla un taxi et indiqua l’adresse de l’école au chauffeur sans excès de chaleur ou d‘enthousiasme. Car oui, cela lui arrivait, fréquemment même, dans le monde réel où il pouvait jouer à feindre maintes et maintes choses sans craindre qu’une bizarrerie liseuse de pensée ne le trahisse ou que ses faits et gestes ne soient relatés dans un magazine spécialisé. Ici, il était un anonyme londonien, rien de plus, et celui lui ouvrait bien des portes. Simplement, ce matin, il n’avait pas envie de discuter avec ce genre de gros chauffeur mal rasé qui sentait le tabac froid. Du reste, le trajet ne durerai pas assez longtemps pour qu’une conversation fertile voie le jour. Ils arrivèrent quelques minutes plus tard et Nedru paya en liquide (mais demanda la monnaie, on n’était pas au cinéma).

Entrer dans l’école fut un jeu d’enfant. L’Angleterre a beau ne pas être laxiste sur la sécurité, faire un peu de charme à une vieille gardienne en se faisant passer pour un cousin venu chercher sa parente continue de vous ouvrir beaucoup trop de portes. Et puis, l’école n’était pas vraiment respectueuse des normes en vigueur..

Il était sur place. Un établissement sans gaité, aucune fête ne venait ternir le calendrier et les murs de l’école se passaient ainsi de décorations laides et bon marché. Pas de plantes dans les couloirs, à peine quelques statues d’art moderne pour tenter de colorer le grand hall. L’école se voulait sérieuse, classe, sobre. C’était raté. Les établissements d’où sortaient des têtes alourdies se devaient d’être vivants et de s’éparpiller sur chaque tableau d’affichage comme autant de petits musées amateurs. Et ce n’était pas le cas ici. Tant mieux, après tout, les imbéciles étaient plus obéissants.

Nedru connaissait la classe de Jenny, il eut tôt fait de dénicher un organigramme assez exhaustif pour lui permettre de se placer devant une salle de classe juste avant une pause. Lorsque les élèves en sortirent, il avisa un groupe de jeunes filles timides et les aborda sans ménagement. Il était beaucoup plus facile de soutirer des informations à ce genre de personnes.

-Bonjour mesdemoiselles ! Vous avez cinq minutes ? J’aimerai vous poser quelques questions au sujet de Jenny Boyer, si cela ne vous pose pas de problème ? Je vous paye un café pendant qu’on discute ?
L’une d’entre elle piqua un fard, jeta un coup d’œil interrogatif à ses amies puis décida de se faire porte parole de leur petit groupe.
-Oui, si vous voulez. Vous êtes qui ?
-Je m’appelle Marc, on m’a demandé d’enquêter sur la disparition de Jenny. Est-ce que vous savez quelque chose ? Nedru ne dissimula pas son sourire prédateur mais força ses yeux à prendre un éclat amusé. Voilà des jeunes filles intelligentes, qui posaient les bonnes questions. Mais ne savaient probablement pas mentir.

-On en sait pas plus que depuis trois semaines. Vous savez, on n’était pas très copines avec Jenny alors on peut pas vraiment vous aider.
-J’imagine que vous en savez autant que tout le monde ici; ce genre d’histoire délie les langues, des bruits courent, non ? De toute façon je veux simplement que vous me donniez votre impression sur Jenny. Vous n’avez pas à être plus polie qu’il ne faut; je n’ai pas bonne opinion d’elle. Vous reprenez les cours dans quinze minutes je crois ?

Les jeunes filles se détendirent un peu le long de la tirade puis acquiescèrent vigoureusement. Un peu plus jeunes que lui , elles étaient comme hypnotisées. Elles le prenaient sans doute pour un professionnel, et son jeune âge évoquait quelqu’un d’extrêmement talentueux à leurs yeux. Elles burent leur café en dissimulant du mieux possible leur dégout, à toutes petites gorgées, le nez caché dans le gobelet de plastique, comme une portée de chatons surveillée par leur mère. Elles voulaient faire les grandes. Nedru aussi, du reste, il avait horreur de ce genre de sous café pisseux, mais c’était l’image qu’il devait leur envoyer. Au moins dissimula-t-il son dégout avec un talent d‘habitué.

-Jenny heu… c’est une fille très jolie mais bon.. Elle le sait quoi… Elle est un peu nunuche, elle écoute jamais en classe, parfois elle ne vient pas. Elle préfère sortir avec Kat’ et leurs copains qu’avoir des bonnes notes.
-Justement, elles ont des petits copains ?
-Il parait Jenny voyait un garçon un peu plus vieux après l’école, je connais pas son nom. Kat’ doit le connaitre. Une autre fille que Nedru n’avait pas encore entendu prit la parole soudainement; -La police a été voir chez lui mais elle n’y était pas apparemment ..
-Laisse moi finir ! Kat’ a pas de petit copain et Jenny change assez souvent. Elles sont comme ça toutes les deux… Je veux dire… c’est ce genre fille quoi vous savez.

Nedru sortit un papier soigneusement plié et nota au porte mine les diverses informations. David était plus malin qu’il ne le pensait s’il avait réussi à cacher Jenny malgré les soupçons de la police. Il demanda à quoi ressemblait Kat et dressa une liste de ses traits marquants.

-A part Kat’, Jenny avait d’autres amies ? Même en dehors de l’école ?
-Bin elle était populaire, alors sûrement. Mais elle était tout le temps avec Kat’ quoi…
-Et je suppose qu’elle était aussi assez impopulaire. Vous n’avez pas l’air de l’apprécier et vous n’êtes certainement pas les seules. Des garçons au cœur brisé ? Des rivales en amour ? N’importe quoi d’autre ?

Elle acquiescèrent de bon cœur une fois encore.

-Il y a Jean, l’un de ces ex. Elle l’a largué puis il s’est trouvé une autre copine il y a pas longtemps. Avant il y a eu Hugo, Scott, Chris, Kévin, Lo…
-Non, Kévin est resté libre lui !
-Oui Bref… Pas mal de monde mais personne qui irai lui faire du mal.
-En filles, il y a pas mal de jalouses, Meg ici présente la première.
-Hé, ça va pas ?! Fard immédiat. -Je l’aime pas, elle m’insupporte c’est tout ! Et je lui ferai pas de mal quand même.
-Ca va, je plaisantais. Enfin si toutes celles qui se faisaient piquer un copain enlevaient leur rivale, ça ferait des disparitions tous les jours. C’est plutôt courant dans le coin. Et de nos jours.. Enfin vous savez…

Voilà qui se compliquait, mais mieux valait avoir trop de cartes dans son jeu, quitte à en jeter quelques unes plus tard. Il nota beaucoup moins de noms qu‘il ne lui en fut dicté. Les filles étaient intelligentes, assez pour pouvoir décrire assez précisément le caractères de leurs camarades de classe lorsque cela leur était demandé. Et Nedru savait que si Jenny était chez l’un d’entre eux, elle ne s’y sentait pas en danger. La pause touchait à sa fin. De toute façon, le trio ne lui apporterait rien de plus, il ne lui restait qu’à trouver Kat pour avoir les informations manquantes qu‘il était venu chercher. Nedru se dirigea à la suite de ses aimables sources vers la prochaine salle de cours, avec l’intention d’y trouver la jeune fille afin d’échanger les quelques mots qu’il espérait avec elle.

Mais elle ne vint pas. Il resta devant la porte narquoise après que tous soient rentrés, supportant stoïquement le regard vindicatif d’un professeur soupçonneux. Elle allait forcément finir par arriver ! D’autres continuaient d’entrer dans la salle par intermittence, en fonction de leurs perceptions personnelles du temps que se devait de durer une pause. Mais pas Kat. Pourtant, elle était là l’heure d’avant ! Sale gamine stupide ! Nedru n’avait pas un amour particulier de l’école, cela va sans dire, il gardait des séquelles de sa phobie de toujours, mais tout de même. Sécher quelques cours choisis, c’était faire les choses à moitié, rien de plus qu’un acte de paresse imbécile !

Nedru rebroussa chemin à travers les couloirs encombrés du bâtiment. On le dévisageait. Tout le monde se dévisageait; dans ce genre d’endroit où tous se connaissaient de vue, les regards se tendaient au moindre signe de nouveauté, se braquaient sur l’inconnu, quel qu‘il soit. Ils en avaient besoin; leurs vies étaient creuses et vides, petits fils à papa dont le monde gravitait autour d’un carnet de note ou d’un programme télé.. Ils avaient soif de nouveautés, de quoi assaisonner leur vie fade et aseptisée. Nouveauté qu’il incarnait pour l‘heure, lui qui foulait le sol plastifié à grandes foulées rageuses. Il les toisait d’un air princier, toutes ces petites merdes imbéciles ! Qu’il mette seulement la main sur cette Kat, il lui ferait cracher ce qu’elle savait !

Il sortit furieusement de l’établissement, replongeant dans les rues calmes d’un Londres repu. Le Renard, lui, avait faim, aussi se laissa-t-il guider par son nez lorsque des effluves de malbouffe typique vinrent le lui chatouiller. Une odeur d’huile et de graisse qu’il détestait mais le mit cette fois en appétit. De toute façon, il ne souhaitait pas s’éloigner trop de l’école de Jenny; Kat pourrait s’y trouver plus tard dans la journée. Sinon, il trouverai son adresse dans quelque fichier détenu par l‘école. Rester sur place était donc nécessaire. Il trouva sans peine le snack responsable de l’attentat olfactif et y pénétra en laissant ses sens s’imprégner des sons et odeurs présents. Ce genre de lieu était chargé d’histoires, de petites transactions louches, de discussions chuchotées, s’y échangeaient des rumeurs, dont l’établissement était parfois l’objet... Un climat appréciable. Et la chance sourit à Nedru. Tandis qu’il se délectait de l’ambiance du boui-boui de seconde zone, une créature qu’il ne s’attendait pas à trouver ici croisa sa route. Petite, mince, des cheveux noirs teintés récemment sur une coupe plutôt carrée, sac à main hors de prix, accoutrement provoquant mais indéniablement à la mode, un cardigan beige et rouge pour finir d‘ôter toute hésitation; Kat en personne, telle que décrite un peu plus tôt. C’était trop beau ! Nedru humecta rapidement ses lèvres sur lesquelles se dessinaient un fin sourire et passa sa langue sur ses dents fines. Il laissa Kat le dépasser et sortir de l’établissement avant d’aller à sa rencontre;

-Mademoiselle ?
Elle se retourna paresseusement et haussa un sourcil. -Oui ?
-Excusez moi, vous ne seriez pas -on ne m’a donné que votre surnom je vous prie de m‘excuser encore une fois- Kat ?

Elle le détailla d‘un air soupçonneux, une moue dessinée sur ses lèvres rouges. Mais elle s’y connaissait, et lui aussi; Nedru portait sous sa veste des vêtements propres et soignés, quasiment neufs, de bonne qualité et de marque. Elle ne s’y tromperait pas; elle avait face à elle quelqu’un de riche ou d’aisé, qui se permettait de passer une veste personnelle qui accusait quelques signes d’usure sur un ensemble hors de prix. Quelqu’un qu’elle écouterait. Sa bouche inversa sa courbe pour dessiner une sourire discret. Nedru y répondit par son rictus narquois habituel, à mi chemin entre la séduction, la joie et le mépris.

-Bonjour, je m’appelle Marc. J’aimerai vous poser quelques questions concernant Jenny Boyer si ça ne vous dérange pas. Je vous paye un café ?

Elle haussa un sourcil et accepta, le guidant vers une enseigne vendeuse de café à vomir proposés à des prix exorbitants. Mais à la mode. Rien d’étrange là dedans. Une fois installé, il posa ses yeux dans ceux de la jeune fille et posa sa question de la manière la plus direct possible.
-Connaissez vous un certain David qui côtoierai Jenny ?

Elle cligna des yeux deux fois, puis les plissa en baissant légèrement la tête, prit un air sérieux et répondit « non » presque au tac au tac, en se grattant imperceptiblement le bout nez, comme pour en chasser une poussière invisible. Dommage pour elle, Nedru était un excellent joueur. Bluffer était dans ses cordes à lui, pas à elle.
Alors il s’excusa et prit un air innocent et souriant, puis s’excusa;

-Mais vous n’avez pas cours au moins ? Je ne vous dérange pas ?

Elle répéta quelques uns des tics précédents mais se calma face à son air désinvolte. Il en savait assez pour passer à son interrogatoire. Qui comporterait une zone à risque qu’aurait immédiatement éliminé son pouvoir dans Dreamland. Il n’était pas aussi infaillible, ici, il ne pourrait pas lire comme dans ses pensées. Mais cela lui suffisait. Il la prit par surprise une seconde fois en posant sa question suivante d’un ton glacial.

-Savez-vous si Jenny voyait quelqu’un en plus de David ses derniers temps ?

Sa réaction fut proportionnelle à la surprise provoquée par ce revirement d’attitude, ses tics nerveux se firent plus prononcés cette fois. Et elle mentit une fois de plus;

-Non, je crois qu’elle ne voyait personne.
Nedru sourit intérieurement et effaça de son visage toute trace de dureté. -Hum, et bien tant pis ! Vous m’avez l’air honnête, j’ai voulu vous surprendre mais rien à faire ! Pourriez vous me dire ce que vous savez sur sa disparition ?

La suite de la conversation fut entrecoupée de silences gênés. Kat’ n’avait aucunement envie de se retrouver ici. Mais elle pensait avoir affaire à quelqu’un d’incompétent et se laissa un peu aller à baisser sa garde à la fin, tandis que Nedru changeait de sujet en parlant de la mode, lui demandant si par hasard elle était mannequin. Gênée oui, car le garçon produisait toujours cet effet sur les gens qu’il n’hypnotisait pas. Mal à l’aise mais sûre d’elle car en position de manifeste supériorité malgré tout. Nedru prit finalement congé dès qu’il eut fini son breuvage infect. « Merci pour tout » lui souffla-t-il tandis que son vrai visage se dessinait; un sourire narquois et des yeux prétentieusement posés sur quelqu’un qu’il ne jugeait guère mieux qu’un insecte écrasé sur sa paume. Il sentait le regard plein de confusion que lui jetait Kat’ dans son dos tandis qu’il quittait les lieux d’une démarche aristocratique qui lui était propre.

Il testa le tranchant de ses canines sous sa langue, comme à chaque fois qu’il était satisfait. Parfait. Nedru était aussi content qu’affamé et le chose était fort bien faite, car il pouvait désormais s’en retourner chez lui déjeuner l’esprit tranquille. Il était trop tard pour qu’il se rende chez la petite Boyer à sa façon, il disposait désormais de la fin d’après midi pour s’adonner à ses activités quotidiennes.

Une fois de retour chez lui, Nedru se prépara un déjeuner à base de tartines grillées et mit de l’ordre dans les différentes données qu’il avait en sa possession. Jenny était toute proche. Il adressa à son commanditaire un court message; « Je ne vais pas tarder à la retrouver . « Elle va bien, ne vous inquiétez pas. Préparez le paiement. Simple curiosité; où était-elle quand la police est passée chez vous ? » avant de se plonger dans la presse quotidienne. Il occupa le reste de son après midi en jouant aux fléchettes, fit des tours de cartes en regardant les informations sur diverses chaine, travailla un peu avant de pratiquer de nombreux exercices musculaires en écoutant la Sinfonietta de Janeck , puis se coucha sur un dîner copieux, pleinement satisfait de sa journée. Il penserait à Kat cette nuit, pour ne rien laisser s’échapper du côté de cette piste. Et puis, elle était presque à son gout.

~~~~~~

Il sut où il était apparu avant même d’ouvrir les yeux. Il s’éveillait toujours les yeux fermés lorsqu‘il apparaissait dans Dreamland, comme dans le monde réel. Toujours légèrement engourdi, son corps revenait à la vie au bout de quelques minutes. C’était moins difficile que se sortir du lit, mais tout de même légèrement perturbant, se réveiller debout et en pleine forme alors qu’on venait de quitter un corps parfaitement détendu et relâché le laissait toujours un brin déphasé.

Toujours est-il que l’odeur de moquette poussiéreuse lui était familière, de même que le silence bourdonnant et ennuyeux. Il ouvrit les yeux; Relouland, Centre des Activités non Divertissantes et du Labeur Improductif. Non loin du lieux où il s’était tant et tant terré ces dernières années que c’était tout comme si un bureau lui avait été attribué. Il contempla les lieux insipides d’un œil glacial. Kat s’endormirai après lui, il l’avait ratée. Il s’était endormi bien trop tôt, en y repensant… Et il n’avait rien à faire ici, et il était fort peu probable qu’il trouve de quoi s’y amuser. Cinq années de rêves fades lui avaient amplement suffit.

Il aurait aimé pouvoir faire une carte du Royaume, mais malgré son pouvoir, il lui était impossible de retenir parfaitement la configuration de l’endroit. Des parcelles étaient constamment fermées, ou en travaux, ou déplacées, réaménagées, détruites, rénovées… Un calvaire. Venir à Relouland n‘était jamais (ne Devait jamais) être agréable. Inutile d’y venir faire une promenade de santé.

Alors pourquoi Nedru était-il resté si longtemps en ces lieux ? Si ses premiers pas dans Dreamland ne lui avaient pas fait frôler la mort à trois reprises, coup sur coup, il aurait pu en être autrement. Relouland, justement de par sa nature, tenait éloigné les Voyageurs un peu trop violents. Les services de sécurité y étaient efficaces et impressionnants, comme les gonds d’un coffre fort massif. Un royaume à l’image insipide qui cachait bien ses secrets ; tout à fait à l’image du Renard. Nedru s’y était exercé jusqu’à ses limites actuelles mais il lui en fallait désormais plus.

Mais bon, tout n’était pas inutile à Relouland, loin de là. Une quantité d’information inégalée s’y déversait chaque seconde, jour après jour, concernant des aspects aussi ésotériques que le sens de rotation des nuages jusqu’à la progression de chaque Voyageur puissant. Les journaliste du Dreammag y puisaient certainement une source d’inspiration infinie.

Se pourrait-il ?.. Que des informations sur Jenny y soient stockées ? Si tel était le cas, il achèverait peut être le travail plus rapidement encore; rien qu’en trouvant une liste des Royaumes qu’elle avait visité ces dernières nuits il pourrait deviner son état d’esprit et donc peut être les raisons de sa deuxième disparition, voir l’endroit où elle se trouvait ! C’était faire grand cas de son pouvoir; il ne parviendrait jamais à ce genre de conclusion de lui-même, mais le pouvoir de l’analyste était réellement impressionnant lorsqu’il y mettait le temps. Et faire grand cas des informations stockées ici…

A mesure qu’il y pensait, Nedru réalisa que si un tel lieu existait, des informations bien plus intéressantes à ses yeux y seraient accumulées. Il pourrait peut être y trouver une liste de Voyageurs classés par aptitudes ? Ce qui lui serait d’un grand secours pour ces plans sur le long terme… Il s’était mis en tête une telle quête plusieurs années auparavant et s’était alors promis de poursuivre ses recherches plus tard. Comment diable avait-il pu oublier ?! Il manquait alors d’expérience, son pouvoir tâtonnant ne lui servait pratiquement à rien, mais tout de même… Et puis, il n’était pas impossible que ce genre d’information existe. Peut être sans classement, peut être sous des formes hétérogènes, mais il lui fallait en avoir le cœur net.


-Elle est où Jeanne ?..

Une créature insipide et voûtée l’interrompit dans ses réflexions pour lui poser la question préférée des autochtones. Peut être une sorte de mot de passe, pour ce qu’il en savait… La dénommée Jeanne n’existait pas. Sorte d’entité respectée de tous, travailleuse attentive, elle allait partout, faisait tout, sorte de super-secrétaire mystique invisible… Il n’avait comme d’habitude pas la réponse à l’intemporelle question et improvisa joyeusement, comme à l’accoutumée;

-En congé maternité. Et vous devriez faire de même; vous êtes papa, mes félicitations ! Bonne journée à vous !
-Aaah?...

L’autre resta planté là un moment, le regard vide, les yeux plissés, le nez tendu vers Nedru comme pour tenter de comprendre ce qu’il venait de dire. Puis tourna les talons, se retourna une nouvelle fois, visiblement désorienté, puis s’en alla finalement. Nedru sourit d’un grand sourire, pour personne d’autre que lui-même, et ajouta;

-Dépêchez vous !

L’espèce de spécimen mollasson bureaucratique s’en alla sans savoir s’il fallait trotter ou marcher d’un bon pas, aussi enchaîna-t-il les deux allures à tour de rôle, cumulant avec brio le grotesque et le pathétique. Nedru s’accorda de rire de son rire désagréable et grinçant, ne serait-ce que pour s’attirer les regards outrés des créatures qui passaient par là, qui le regardèrent comme s’il proférait quelque grave juron.

Allez, en route. Ce qu’il y avait de mieux à faire pour ne pas se perdre; suivre les rêveurs aux mines éreintées. Ils avaient dû travailler toute leur nuit et ne rêvaient plus-au sens propre, tous l’aurons compris- que de rentrer chez eux, ce qu’ils n’arriveraient jamais à faire car ils se réveilleraient probablement avant. Certains disparaissaient en cours de route, mais globalement Nedru fut guidé vers un ascenseur froid sans problème. Il avait l’habitude. Encore que l’ascenseur se trouvait à l’exact opposé lors de sa dernière visite. Dans l’ascenseur presque uniquement peuplé de rêveur, il s’amusa à leur tendre un grand sourire carnassier de jeune requin aux dents longues. Peut être que s’ils le croisaient dans le vrai monde, ils en garderaient inconsciemment un sentiment de respect mêlé de haine que l’on nourrit à l’égard des plus puissants que soi ? Cette idée lui plaisait bien et acheva de le mettre de bonne humeur.

Puis finalement, Nedru se lassa car la descente était interminable et il était pressé. Tout était ainsi à Relouland; juste trop long. Il sortit enfin après presque dix minutes passées dans le compartiment minuscule à échanger des odeurs avec de parfaits inconnus. Le reste allait se compliquer. Les portes s’ouvrirent sur une salle immense où régnait un brouhaha fatigué.

Obtenir un renseignement était ici une épreuve en soi; beaucoup de rêveurs venaient dans le Grand Hall simplement pour faire ce genre de cauchemar (ou de rêve sordide, selon les tempéraments). Obstacle principal; il fallait passer outre des files d’attentes interminables…au sens propre, puisque ce genre de rêveries étranges semblait communes à une part non négligeable de la population mondiale. Attendre, sans savoir pourquoi et au final… pour rien. Voilà qui était réellement pathétique et bien digne de tous les rêveurs qu’il avait sous les yeux. Il renfila avec dédain.

Il allait falloir la jouer fine. Le Renard Gris analysa la situation en prenant tout son temps, capuche rabattue sur les oreilles, insensible à l’agitation ambiante. D’abord, les créatures aux guichets. Elles semblaient non pas incompétentes, mais bien au contraire compétentes pour ne pas donner le renseignement voulu. Du moins, pas directement. Perfides créatures dont l’amusement était certainement de déclencher l’ire de parfaits inconnus pour pouvoir les rabrouer mollement; « vous reviendrez quand vous serez calmés monsieur, je suis désolée monsieur, nous allons vous demander de partir monsieur. » Et l’inconnu se faisait jeter dehors sans ménagement. Par des brutes de plusieurs mètres en costume noir et lunettes de soleil assorties, parfaitement. Le fameux système de sécurité. Ces types semblaient plus robots qu’organiques, ne parlaient jamais, ne bougeaient que si nécessaire et alors avec une vitesse et une précision de gestes incroyable. Indéniablement rassurant à avoir avec soi, même si un groupe de Voyageur organisé n’aurait probablement aucune peine à s’en débarrasser. Mais Relouland regorgeait d’autres systèmes de sécurités qui lui étaient propre pour palier à ce genre d‘éventualités…

Il lui fallait tout d’abord esquiver la file d’attente interminable. Ceux qui s’y risquaient étaient généralement dans un état proche de la frénésie et finissaient reconduits au tout début, sans ménagement. Nedru chercha des yeux un petit employé possédant toutes les marques de sa profession; lunettes, liasses de papiers surchargées, le suivit dans un couloir plus ou moins désert et le dépouilla rapidement de ses effets. « Je me charge de ça à ta place, prend des vacances » lui dit-il, plus ou moins sur le ton de la menace. La petite créature des rêves usée et fatiguée prit ses jambes à son coup sans demander son reste.

Il se dirigea vers les secrétaires chargées de l’accueil. Le truc, c’était de les contredire. Elles ne fonctionnaient que dans l’opposition; trop compétentes pour vous donner l’information que vous ne vouliez pas, ce serait leur faille. Il aborda la secrétaire sans faire attention aux regards des agents de sécurité qui se braquaient sur lui ou l’air exaspéré de l’employée. Son intonation était celle d’un cadre soumis;


-Bonjour madame. Je dois donner ces papiers au service des archives en personne, mais ce n’était pas là où vous me l’aviez indiqué.
-Qui êtes vous monsieur ? Je ne vous reconnait pas, si je vous avait donné une indication, je m’en souviendrai…
Nedru ne s’attendait pas à ça. Son pouvoir lui sauva la mise en trouvant les mots à sa place; -On m’a demandé de faire de la chirurgie pour correspondre aux critères d’identifications je-sais-plus-quoi. Alors j’y suis allé mais ensuite on m’a dit que ça n’avait rien à voir !

La secrétaire ne sembla guère plus troublée que ça devant l‘énormité de son excuse.

-Pff, ça doit être Chantal, elle fait n’importe quoi. Non, pour le service des archives c’est;

S’en suivit une liste ultra impressionnante d’indications alambiquées et parfois quasi métaphoriques ou données par énigmes vomies à un rythme hallucinant. Nedru laissa son pouvoir assimiler la chose et se la répéter en des termes plus clairs. Le processus dura un certain temps, dont sembla se délecter la secrétaire en jetant des coups d’œils furtifs au suivant dans la file d’attente. Nedru lui avait fait perdre du temps et continuait encore, elle adorait ça. Puis au bout d’un moment, elle jugea peut être qu’il serait bon de faire craquer le Gris pour le pousser à déclencher un scandale qui lui ferait perdre quelques minutes de travail et demanda d’une voix éteinte; « Vous pouvez vous pousser maintenant? »

Il s’exécuta en brouillant des remerciement conformément à ce à quoi elle s’attendait. Puis il sorti du Grand Hall et jeta à la volée lunettes et liasses de papier.

S’il avait bien compris -et l’inverse était impossible- il lui faudrait sortir du bâtiment pour accéder aux archives. Il n’était jamais sorti du bâtiment dans lequel il travaillait; il avait toujours pensé que Relouland s’étirait à l’infini, comme un hôpital sordide et froid (ou une sorte de métro moins haut en couleur) aux dimensions d’une gigantesque ville. Il n’avait jamais vu de fenêtre donnant sur l’extérieur, tous les halls menaient vers d’autres escaliers, d’autres couloirs, d’autres salles d’attente bondées. Il était bien sorti dans une sorte d’allée aux allures de rue normale, comme on trouve dans chaque ville, et dans laquelle se trouvaient divers bâtiments aux allures de tribunaux austères plantés sur des trottoirs ternes et sales, mais il avait remarqué plus tard qu’en guise de ciel ne se distinguait qu’un plafond très lointain, couvert de néon blancs en partie défectueux. Aussi, lorsqu’il suivit les indications qu’on lui avait fournies, qu’il descendit les vingt huit étages par les escaliers en changeant de couloirs (dont la plupart étaient fermés) à chaque nombre premiers, qu’il eut compté les portes à droites et à gauche au bout du cinquième couloir après avoir traversé le grand hall -pas le troisième le quatrième et qu’il se dirigeait vers une porte de service censée donner sur l‘extérieur, il eut du mal à contenir son émotion. Il faisait étonnement bon, à mesure qu’il avançait, comme si les murs se souvenaient qu’il pouvait circuler entre eux de l’air venu de l’extérieur, un air qui ne serait pas vicié par les mêmes haleines et les mêmes effluves transportées ici ou là aux détours d’un système de ventilation qui ne marchait pas (en travaux). Nedru était épuisé; tout était trop grand pour quelqu’un de sa taille. Un géant de trois mètre n’aurait eu aucun mal dans les escaliers, ou à traverser les couloirs et halls immenses, mais ce n’était pas chose aisée pour le Voyageur qui se répétait inlassablement la direction à prendre, une litanie presque sacrée qui devait le protéger du fatal égarement.

Enfin, Nedru trouva la porte taupe -pas grise, taupe- pas plus grande qu’une porte de service effectivement (et ces proportions étaient ridicules par rapport à celles des lieux l’encadrant) , en fer simple, sans fioriture, qui devait donner sur l’extérieur. Entre les interstices de la porte, de l’air s’engouffrait en flux continu comme si tout le royaume tentait d’aspirer un peu de fraîcheur par cette seule narine tournée vers l’extérieur. Nedru tourna la poignée avec satisfaction. En marchant d’un bon pas, il lui avait fallu facilement plus de deux heures pour parvenir jusqu’ici. Il savoura l’instant. Et poussa la porte vers l’extérieur. Un vent violent lui secoua les vêtement, le lava de la mollesse de l’endroit, lui agita jusqu’aux racines des cheveux. Puis la porte claqua derrière lui comme pour clôturer cette entrée dans un autre monde et le courant d’air s’apaisa instantanément.

Relouland, Extérieur. La sensation de découvrir quelque chose était pour lui devenue une source de joie inestimable, depuis qu‘il avait acquis son pouvoir. Quelque chose de cette envergure le laissa naturellement coi quelques secondes. Mais il n’avait plus de temps à perdre. Il lui fallait descendre, encore. C’était logique en fait; les enfers modernes ne se descendaient plus; on gravissait chaque étage lentement et douloureusement pour se perdre dans un monde de bureaucratie vide et absurde. En sortir ne nécessitait que de descendre, en courant si possible. Quoiqu’il ne cherchait pas à en sortir, mais bien à pénétrer au cœur du système d’information… Ah, tant pis, il n’était pas doué pour la philosophie lyrique !

L’aspect extérieur de Relouland était étrangement sauvage, pas terne et plat comme on l’on pouvait s’y attendre. Rien de beau pour autant, l’endroit avait des allures de désert lunaire, mais s’y dégageait quelque chose de puissant. En guise de sable, des petits caractères d’imprimerie, comme si quelqu’un avait secoué des milliers de dictionnaires pour en faire tomber les mots qui échouaient ici, puis s‘usaient et perdaient de leur éclat pour finir sur un ocre jaunâtre. Au loin, des sommets abrupts dégageaient une énergie intense, comme en confrontation psychique. Des nuages s’élevaient à leurs sommets, probablement à cause de l’effort fourni. Le vent soufflait faiblement mais presque aucun son ne se faisait entendre, raison probable de l’impression de sauvagerie immaculée du lieu. Des odeurs lointaines parvenaient jusqu’ici, mais elles étaient diffuses.

Nedru n’avait pas le temps de s’attarder, mais c’était plus fort que lui, il devait lever les yeux, contempler, se retourner pour examiner l’aspect externe de Relouland. Une file de créatures ailées (ou des documents volants ?) s’engouffraient dans des failles qui se refermaient immédiatement à l’intérieur du bâtiment, lequel ne comportait aucune ouverte, aucune aération, aucune fenêtre, rien d’autre que des murs lisses et sombres qui s’ouvraient imperceptiblement par intermittence.

Pourtant, pourtant… Il avait une mauvaise impression. Comme une sorte de déjà-vu. Il ne pouvait pas avoir déjà vu cet endroit, et pourtant il ne pouvait s’empêcher de le trouver familier. Peut être avait-il visité un lieu extraordinairement semblable ? Il ne s’en souvenait pas, et cette idée lui était insupportablement irritante…

Il suivit un chemin escarpé qui descendait férocement avec seulement en tête une vague idée de ce qu’il devrait trouver plus loin. Un « escalier mécanique » l’amènerait jusqu’où il voulait se rendre. A priori, nulle trace d’un tel dispositif dans les environs. Au bout d’un bref moment d’une descente qui ne posa nul problème, une légère rumeur se fit entendre, qui devint un brouhaha semblable à celui du Grand Hall à mesure que les pas du Renard le portaient vers le bas. La chaleur s’était faite plus intense, et les odeurs plus vives. L’odorat parfaitement exercé et exacerbé par les pouvoirs de Nedru distinguait notamment des odeurs de sueur, pour son plus grand déplaisir. Enfin, il arriva dans une petite cuvette rocheuse. La scène qui s’y déroulait était absurde, à la mesure du monde des rêves. Un escalator en haut duquel était placée une large banderole « Départ » se chargeait de remonter une quantité colossale d’individus vers la cuvette. De là, un petit régiment d’êtres affublés en tenues de sports complètes trop chaudes pour l’endroit se chargeaient de leur passer une chasuble et les guidaient vers un défilé en les pressant de se mettre à courir. Un panneau dans le défilé indiquait le nom du Royaume vers lequel ils étaient menés mais Nedru n’arrivait pas en déchiffrer les caractères.

Il s’avança presque timidement vers l’escalier jusqu‘à ce qu‘il s‘aperçoive que personne ne lui prêtait attention. A gauche, l’escalator descendait. Et si le côté montant (le droit) était parfaitement surpeuplé, bondé, grouillant et dégoulinant de rêveurs et de créatures anti-agoraphobes (elles adoraient être collées aux gens, déclencher des disputes, lâcher des gaz dans des lieux bondés…Ce genre de choses délectables) et bien le côté permettant la descente était parfaitement désert. Une descente vertigineuse; il était impossible de voir le fond de l’escalier. Ceux qui montaient devaient subir un véritable calvaire.. Nedru les aurait presque plaint s’il avait été capable d’une once de compassion. A la place, il se contenta de sourire devant l’impressionnant sadisme du dispositif.

Il s’engouffra dans l’escalier qui descendait et le dévala en trottant. Ceux d’en face le regardaient d’un air envieux et il n’avait rien d’autre à faire que de les observer en retour -il n’eut bientôt plus besoin de regarder les marches pour les dévaler quatre par quatre. Ils n’étaient pas des rêveurs à la mine aussi usée que dans les bureaux; ceux qui cauchemardaient d’un escalator qui n’avançait pas étaient plutôt sportifs dans l’ensemble, ou l’avaient été. S’ils le regardaient d’un air envieux, il ne prit pas la peine de créer un rire fabriqué cette fois. Il souriait à pleines dents, car il était heureux. Il s’approchait d’un lieu bien gardé et la récompense serait donc de taille. La quantité de Rêveurs qui « en sortait » n’étaient qu’un subterfuge destiné à ceux qui auraient aimé descendre en croyant se rendre vers un lieu secret. Il les toisait donc d’un regard narquois, le cœur gonflé d’autosatisfaction à l’idée d’avoir saisit le but profond de leur présence ici, qu’eux même ignoraient certainement.

La descente aurait pu être une fois encore « un peu trop longue » mais son immensité trahissait sa nature de leurre, et plus l’escalator se prolongeait, plus le Renard y voyait sa conviction renforcée. La queue à sa droite devenait de plus en plus éparse, certains rêveurs avaient même la place d’y apparaitre. Bientôt (tout est relatif, ceux d’en face en avaient pour la nuit avant de voir le sommet) il n’y eu plus du tout personne en face de lui. Puis plus de bruit, plus même d’odeurs. Il était seul à nouveau. Combien de temps descendit-il ? Très longtemps, c’était certain. Un rêveur se serait réveillé car il souffrait réellement, intensément. Ses cuisses étaient proches de la tétanie, il s’arrêtait régulièrement pour reprendre son souffle et calmer l’affolement de son cœur (il faudrait qu’il se mette au jogging pensa-t-il, il s‘y prenait trop mal pour étendre les efforts physiques violents). Alors il sentait le sang dans ses chaussures, déjà poisseux. Mais il ne s’en souciait pas. Il avait le sentiment d’être déjà venu ici, et s’il en était sorti vivant à l’époque, ce ne serait aujourd’hui plus qu’une formalité. Et s’il ne s’en souvenait plus, c’était forcément quelque chose de très grave.

Enfin, il vit devant lui se dessiner une silhouette pâle, d’un objet immense. A mesure qu’il approchait, il en distingua les contours, suffisamment pour déterminer qu’il avait face à lui une sorte d’antenne parabolique colossale. Placée au sommet d’un édifice d’acier noir, l’escalator transporta Nedru juste en dessous. Il estima qu’elle mesurait probablement trois fois la taille de Big Ben. Soit environ deux cent quatre vingt quinze mètres et demi. Quelque chose qu’il aurait retenu. Et toujours cette sale impression…

Enfin, Nedru arriva dans le temple de l’information. Même de l’intérieur, les murs en acier renforcé étaient noirs, décorés uniquement d’oeils vivants, de nez et de divers autres organes sensoriels qui suivaient sa progression avec attention. Il s’avança dans un couloir aux dimensions impressionnantes (mais quel genre de créatures abritaient-ils ?) sans que rien d’autre que le bruit de ses pas ne vienne le troubler… jusqu’à ce qu’une impression étrange ne le fasse frissonner. Il s’était senti parcouru par une sorte de courant, ni chaud ni froid, comme électrique. Il jeta un coup d’œil à la ronde. Personne dans les environs. D’où venait l’agression ? Si l’onde avait eu pour but de le tuer, il ne l’aurait jamais détectée et serait mort sans même en avoir eu conscience. Le genre d’impression qu’il n’avait pas envie d’avoir.

Plus loin, alors qu’il poursuivait prudemment sa route, il arriva à un croisement qui le mena presque immédiatement sur un mur au pied duquel se trouvait ce qui ressemblait à une porte -bien que son aspect n’était guère différent de celui du mur. Plus important encore; devant la porte se tenaient trois personnages. À gauche, une sorte de moine tibétain était assis en tailleur, comme plongé dans une profonde méditation. À droite, le même genre de moine, mais debout et dont le regard jaugeait Nedru avec une acuité de prédateur en chasse. Ses vêtements trahissaient une vocation bien plus martiale et laissaient apparaitre des muscles puissants. Au centre se tenait un personnage imposant, vêtu d’une très ample toge aux teintes vertes. Le plus notable restant que sa tête était celle d’un grand duc (le volatil). Nedru aurait pu ne pas en être plus choqué que ça (il avait discuté avec un gorille la nuit précédente) si les yeux du hibou ne s’étaient pas posés sur les siens. Si le regard du moine de droite était impressionnant, celui du hibou était effrayant. Nedru y déchiffrait probablement ce que tous lisaient dans ses yeux à lui; le hibou le voyait, déshabillait son être, son esprit. Le Gris aurait aimé pouvoir s’effacer, disparaitre, plutôt que de rester confronté à une telle intrusion ! C’était révoltant.


-Encore toi -Hou. Et bien, et bien, tu n’abandonnes jamais -Hou hou !… J’aimerai pouvoir dire que je suis surpris de te voir encore en vie-Hou , mais peu de choses me surprennent. Aussi irais-je droit au but; tu n’as rien à faire ici -Hou ! Quelque soit ta pugnacité, ce lieu n’est fait pour toi -Hou ! Inutile d’essayer de passer par la force; tu t’y es déjà essayé et cela n’a pas fonctionné -Hou ! Et aucune chance pour que cela marche, encore maintenant. Tu ferais mieux de rebrousser chemin et d’oublier l’idée de venir ici -Hou hou…

Nedru était comme tétanisé, son pouvoir semblait inopérant, il pédalait dans du sable. Quoi ?! Qu‘est ce que c‘est que cette histoire? Cet hibou le connaissait ? Il était déjà venu ici ? Et cette impression qui ne l’avait jamais quitté… A chaque réflexion qu‘il se faisait, le hibou hochait la tête, comme s‘il lisait dans ses pensées. « Oublier l’idée de venir ici »… Alors c’était à cause de ça ? Hochement de tête. Et ce qu’il avait ressenti en arrivant ici… Un inhibiteur de souvenirs ? Le hibou inclina sa tête vers l’avant.

-Tout est dit-Hou ! Je te remercie de prendre la peine de m’éviter de t’expliquer. Tu es toujours si attentif -Hou ! Nedru Etol.. Cependant, tu ne mérites pas de venir ici. La connaissance a un prix que tu ne peux pas, et ne pourras probablement jamais payer -Hou Hou !..

Alors ses souvenirs de cette nuit seraient effacés. Peut être même jusqu’à l’idée de chercher cet endroit. Un système de sécurité d’une efficacité remarquable. Nedru jaugea les créatures en face de lui. Des créatures des rêves… Leur potentiel était inférieur à celui des Voyageurs. Il les avait déjà défié ? Certainement pas à cause de son pouvoir; il pouvait prévoir très précisément ses chances de gagner en cas d’affrontement; aucunes. Ils avaient réussi à le mettre suffisamment en rogne pour qu’il perde son sang froid, par le passé ? Il est vrai que le Renard avait beaucoup changé. De voyou indiscipliné, il était devenu un cerveau volontiers démoniaque digne des méchants de dessin animés. Je ne mérite pas de venir ici ? A cause de ça n’est ce pas ? Je m’éloigne trop de votre concept imbécile du « Bien » ? Alors je n’ai rien à faire ici.

Mais partir… La seule sortie, l’escalator interminable ? Voilà que leur propre système de sécurité se retournait contre eux. Nedru s’avança et se mit lentement en garde, les yeux chargés d’une colère sourde. Et ces hululements insupportables, une offense à l'intelligence humaine !


-Oh, alors tu as compris-Hou ? Oui, tu t’es déjà battu, et tu n’es jamais mort -Hou ! Hou… Nous ne te tuerons pas cette fois non plus, c’est ce que tu penses. Alors pourquoi perdre le temps de remonter-Hou ? Autant tenter sur la chance-Hou ! Qui sait, un Voyageur s’endort peut être en pensant à toi en cet instant précis-Hou hou? Ahah, non, je sais que personne ne s’endort jamais en pensant à toi. Sud-Ouest, vas-y.

Le moine de gauche se leva lentement, ses yeux toujours fermés. Il se positionna devant le hibou, en face de Nedru, puis ne bougea plus. La poitrine de l’analyste lui faisait mal. Il avait des envies de meurtre comme il en avait rarement eues, il se sentait à nouveau jeune et imbécile, face à ce trio qui pouvait lire en lui, le briser, lui ôter tout souvenir… Il n’était rien, et il ne pouvait même pas se battre sur son terrain. Forcé d’être sur l’offensive (habituellement, l’on se plaint du contraire, mais Nedru ne savait tout simplement pas comment entamer un combat).
Pour lui, remporter un affrontement était une histoire de changement de rythme, un jeu de feintes et de bluff. Généralement, il se contentait de fuir, se battant bien mieux avec des mots... Mais face à un ennemi qui fermait les yeux ? Il sentait chacun de ses gestes. C’était perdu d’avance. Il se jeta vers le moine et envoya son pied contre le genoux de son adversaire dans l’espoir de lui briser mais l’autre évita au dernier moment sans même donner l’impression de se déplacer. Il glissa son propre pied sous la jambe du Renard et le déséquilibra d’un geste ample.

Nedru se releva d’un bond, toujours plus ulcéré. Il ne se risqua plus aux coups de pieds, envoyant des coups de poings dans tous les sens, visant principalement le plexus, mais chacune de ses attaques était parée, déviée et plus rarement contrée. Les ripostes étaient d’une puissance sans égal avec la sienne, mais on sentait que son adversaire se contrôlait. Le jeune homme eut bientôt le nez brisé et une arcade ouverte l’empêcha de voir correctement au bout de quelques minutes. Ses jambes continuaient de lui faire souffrir le martyr, il était en nage alors que le dénommé Sud-Ouest n’accusait pas le moindre signe de fatigue derrière ses yeux clos. Alors qu’il se faisait envoyer au tapis une fois de plus, la veste du jeune homme qui lui pendait lamentablement sous les épaule acheva de s’échapper de l’une de ses manches. C’était subtil. Sa seule chance. Le jeune homme se redressa difficilement, prenant le temps de reprendre son équilibre une fois posé sur le genoux droit, puis ordonna à ses muscles de le redresser une ultime fois. Puis, d’un geste vif, il envoya voler son manteau vers le visage du moine. Il n’utilisait peut être pas ses yeux, mais son ouïe ou son odorat ne pouvaient se permettre un manteau volant à la rencontre de leurs sièges de perception en plein combat. Le moine écarta le vêtement d’un geste ultra rapide de la main droite. Et reçut le plus puissant crochet que Nedru n’eut jamais donné, sous l’aisselle, crochet qui lui brisa quelques côtes en l’obligeant à tituber pour accuser le coup.


-C’était prévisible, mais tu t‘es amélioré sur le plan de la vitesse, jamais tu n’aurais touché auparavant -Hou ! Sud-Ouest, tu aurais dû t‘en rendre compte… Finissons-en-Hou Hou !

Sud Ouest venait d’essuyer un affront. Il ne voulait en laisser rien paraître, mais c’était évident aux yeux du gris. Ce dernier réussit à en concevoir un peu de joie et s’apprêtait même à lui envoyer une pique pour lui faire perdre son sang froid. Mais il n’en eut pas le temps. Un uppercut surhumain le souleva du sol et il ne put que cracher que du sang tandis qu’il s’écroulait quelques mètres plus loin.

La messe était dite. Ils ne prirent pas la peine de l’achever, comme convenu. Peut être mourrait-il d’une hémorragie interne, peut être pas. Surement pas. En fait, le hibou le savait parfaitement. Sud Ouest aussi. Leurs faits et gestes ne laissaient pas la moindre place au hasard. Nedru agoniserait là, gémissant, crachant et toussant quelques minutes, puis il se réveillerai. Il perdit conscience au milieu d’une flaque de bile et de sang en gémissant des malédictions absurdes.
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MessageSujet: Re: Où est Jenny ? [quête solo terminée] Où est Jenny ? [quête solo terminée] EmptyJeu 13 Sep 2012 - 1:07
Un réveil… particulier. Comme il en avait à priori déjà eu éprouvés par le passé -mais évidemment il l’ignorait. Ces souvenirs de la nuit dernière étaient confus. Il se souvenait qu’il était un Voyageur, de sa vie dans le monde onirique et de toutes les grandes lignes. Mais la nuit dernière… Il était apparu à Relouland, et puis… s’était ennuyé comme un rat mort ? Il s’était promené longuement au détour des couloirs, et s’était finalement réveillé. Une journée de perdue. Nedru s’étira longuement et se massa le visage avant d’écarter ses draps et de poser le pied sur le sol frais. Etrange…Mais inutile de s’appesantir là-dessus; Dreamland était un monde incompréhensible de toute façon. Pour le moment, il était en Grande Bretagne, et il avait du travail.

Huit heure du matin. Il voulait assister à un cours en fin de matinée. Mais il aurait aimé se rendre chez Jenny au même horaire. Début de dilemme. Il était certains professeurs dignes d‘intérêt, et même si les grands amphithéâtres ne se prêtent pas forcément à la pratique de l‘enseignement au sens strict, certains réquisitoires valaient sincèrement le coup. La plupart des professeurs n’étaient pas de cet acabit malheureusement, et venaient aux universités pour pointer, y réciter un discours aussi indigeste que les manuels qu’ils publiaient et faisaient acheter à leurs étudiants, tout ça dans le seul but d’obtenir quelques subventions misérables. Nedru ne se rendait jamais à leurs cours et se contentait de leur servir leur pâtée d’animal universitaire au moment des examens. Le cours de ce matin n’était pas de ce genre là. Le professeur avait quelque chose de haïssable, mais il avait quelque chose d‘étrangement attirant, contrairement à ses opinions méprisées. La vocation, quelque chose comme ça… D’un autre côté, s’il travaillait bien aujourd’hui, il en aurait peut être fini avec toute cette histoire demain. Fin de dilemme.

Après être sorti de la douche, il enfila un léger polo marron extrêmement laid et très différent de ce qu’il portait habituellement. Qui ressemblait à s’y méprendre à un uniforme de livreur. Un pantalon assorti et des lunettes de soleil épaisses. Se déguiser n’avait rien de difficile pour quelqu’un comme lui, il lui suffisait d’ajuster sa démarche et ses intonations, ce qui pour sa catégorie de menteur ne posait aucun problème.

L’adresse de la Boyer était notée dans les informations envoyées par David. Une fois recopiée dans le carnet adéquat, le garçon empaqueta dans un petit sac en bandoulière noir totalement neutre; deux clés USB et une casquette UPS, le carnet précédemment évoqué et un stylo. Son porte carte avec de l’argent liquide en quantité suffisante. Ainsi qu’un pistolet manuel à aiguille très performant qui lui avait coûté beaucoup d’argent et de temps d’entrainement pour en maitriser l’utilisation. Il acheva sa panoplie en attrapant un coli dont le but était uniquement de compléter son déguisement à chaque fois qu’il s’en servait. C’est-à-dire, non pas souvent, mais avec une périodicité que l’on pourrait qualifier de « régulièrement ».

Vers dix heures, il sortit de chez lui et se rendit à pied chez la fugueuse. Le West London n’était pas avare de promenades réjouissantes et puisqu’à cette heure il ne croiserait personne qui risquait de le reconnaitre, il n’était pas nécessaire de prendre des mesures de précaution absconses. Une promenade qui aurait pu être bonne s’il n’avait pas croisé la route de parasites répugnants appelés enfants, qui avaient la manie de vous dévisager d‘un air à la fois curieux et hautain, pour se teindre soudainement de crainte lorsqu’il les empalait du regard et allaient pleurer auprès de quelque vague pseudo autorité parentale sur le déclin. Nedru détestait les enfants. Leur seul intérêt était d’en faire des otages, et encore…

Il arriva à l’adresse de Jenny Boyer près d’une heure après être sorti. Il vissa alors sa casquette sur son crâne. Il était encore trop tôt pour les retour de bureaux, il savait que les parents de Jenny travaillaient et ils ne seraient pas de retour avant un moment. Il avait le champ libre. Car si Jenny habitait dans un beau bâtiment, un appartement de seconde zone reste un appartement de merde -aux yeux d'un animal quasi aristocratique. Il sonna devant un interphone au hasard (tous convenaient, exception faite de l’étage des Boyer) et se présenta comme un employé venu livrer un recommandé. « Je n’attend aucun recommandé. -Vous êtes bien [nom de la sonnette] ? -Oui c’est moi. -Et bien quelqu’un veux vous faire parvenir un recommandé monsieur. » Un refrain connu, les premiers verrous cédaient sans problème. Il emprunta les escaliers tout en sortant son pistolet à aiguilles, qu’il glissa dans une poche. Tout était une question de rapidité maintenant. Il disposait de deux minutes dans le couloir; rester plus longtemps était affreusement risqué. S’il croisait un voisin parti promener son chien il était cuit. Par bonheur, la porte ne lui posa pas de problème. Il avait choisi la bonne gamme d’aiguilles; il n’eut à en changer qu’une seule fois et la porte s’ouvrit sans heurts ni fracas au bout d’exactement cinquante secondes. Porte qu’il referma délicatement derrière lui et bloqua avec une chaine intérieure.

Il rangea son pistolet à aiguilles et ouvrit rapidement et silencieusement plusieurs portes jusqu’à trouver la seule qui ouvrait sur une pièce que l’on n’aurait pas pu identifier autrement que La chambre d’une adolescente. Rien de compliqué là dedans. Les posters de jeunes stars torses nues restaient, quoi qu‘on en dise, des signes évocateurs de poussée d‘hormone. Nedru sortit la clé USB qui portait un sticker en smiley de son sac et l’inséra dans le premier ordinateur qu’il trouva. Sur la clé, quelques programmes destinées à « retrouver sur votre ordinateur les mots de passe que vous avez oubliés » , vendus par des sociétés très bien. Le Renard n’était pas très doué pour pirater des données informatiques, aussi ce genre d’outils restaient fort pratiques à ses yeux. Il alluma l’ordinateur et laissa la clé faire son travail pendant qu’il fouillait la chambre.

Il ne tarda pas à trouver un journal intime, posé sur le bureau, bien en vue. Il doutait que Jenny l’eut laissé là à dessein… un enquêteur avait dû le trouver caché quelque part, le lire et le laisser là. Braves petits enquêteurs. Nedru le manipula délicatement en prenant garde à n’utiliser que ses articulations, en quêtes des dernières pages. Il fut troublé par la facilité avec laquelle il les trouva; le journal était récent d’à peine deux mois et Jenny n’avait eu le temps d’y écrire que relativement peu de choses. Ne s’y lisaient principalement que des niaiseries répugnantes sur le compte de David, dépeint en petit ami parfait et amour « secret ». Aux dernières pages, elle indiquait qu’il était parfois bizarre, voir violent. L’analyste comprit facilement ce qui avait poussé la police à aller fouiller chez lui. Il revint sur le carnet. Quelque chose dans le style était troublant. Un journal intime ne s’adresse généralement qu’à soi même. Ce journal était différent pourtant, comme si elle avait l’habitude de le faire lire à quelqu’un d’autre après, ou qu’elle savait d’une manière ou d’une autre qu’il était lu. Il ne s’y connaissait pas beaucoup en journaux intimes, mais le style lui paru hors de propos.

Ses réflexions furent interrompues par les notes jouées par les baffles de l’ordinateur; le bureau de la jeune fille apparaissait à l‘écrans. Il reposa le journal à sa place initiale, en prenant garde à ne pas le toucher du bout des doigts. C’était court pour un craquage en force, la pauvre enfant n’avait probablement pas utilisé un mot de passe plus élaboré que « mot de passe ». Nedru se caressa les canines du bout de la langue. Tout se passait bien. Il coupa le son, et ouvrit un navigateur sans attendre. Il ouvrit immédiatement des pages de réseaux sociaux.

Il utilisa une fois de plus un programme contenu dans la clé pour ouvrir le compte de la jeune fille. Cette fois, il lui fallut attendre un bon moment avant que le code ne cède. C’était assez illogique compte tenu de la rapidité avec laquelle il avait craqué le premier code. Ce programme là était censé être au moins aussi efficace. Possible même que les précédents enquêteurs, s’ils avaient voulu fouiller de ce côté, n’aient pas réussi à passer cet obstacle… Il ne s’appesantit pas sur ces considérations. Il devait rester concentré. Direction les messages et historiques de conversation. Jenny semblait adorer discuter avec une foule de personnes diverses, mais généralement par smileys ou en éludant rapidement. Beaucoup venaient lui parler, elle ne semblait pas faire l‘effort de briser la glace bien souvent. C'était d'autant plus pratique pour ce qu'il avait à faire. Les conversations faisant exception, récentes et régulières se limitaient à quatre personnes; Kat, David, une dénommée Marie et un cousin dénommé Harold chez qui elle avait passé des vacances récemment. Du côté de Marie et de Harold, rien d’intéressant. Ils étaient proche, sans plus. Elle ne leur parlait pas de son intimité. Il apparut rapidement qu’Harold ne pouvait pas être l’autre personne fréquentée par Jenny que Nedru recherchait, puisqu’il habitait aussi chez ses parents.

Quelques manipulations assez simples lui dévoilèrent les historiques supprimés. Un seul sautait aux yeux. Des conversations avec un certain Kevin Clars, beau gosse. De longues discussions. Historique supprimé mais sans se terminer sur une dispute. Fait encore plus étonnant pour cette tranche d‘âge notoirement stupide; plutôt que de converser par ordinateur; ils semblent préférer s’appeler plutôt que de chatter. « Pour EN parler » dit-il. « T’es vraiment con » répond-elle. Elle continue « Stop, je t’appelle ». Se doutaient-ils que les ordinateur sont par trop bavards ? Intriguant.

Nedru regarda sa montre. Il lui restait moins d’une dizaine de minutes. Il en passa cinq à observer Kevin Clars sous toutes les coutures et prit quelques photos avec son téléphone. Puis il supprima l’historique de l’ordinateur, l’éteint puis lava doucement le clavier. Il avait trouvé ce qu’il était venu chercher.

Il sorti de l’appartement sans faire de bruit, récupéra son colis, puis ferma la porte. Ces mécanismes se refermaient sur votre passage, c’était délicieusement pratique ! Refermer une porte était légèrement plus compliqué et risqué que l’ouvrir, aussi ouvrir ce genre de mécanisme était toujours un réel plaisir. Il sorti dans le couloir l’air de rien, son colis sous le bras, emprunta l‘ascenseur, s’en alla chez l’homme chez qui il était allé sonner, prétendit avoir reçu un coup de fil à l’instant l’informant d’une erreur, s’excusa et s’en alla, ses lunettes de soleil solidement vissées sur son nez.

Dans la rue, il nota le nom du garçon dans son calepin tout en glissant la casquette de l’agence de livraison. Kévin Clars... Nous allons avoir une petite discussion toi et moi, cette nuit.

De retour chez lui, il constata que David ne lui avait pas répondu. Excès de prudence ? Dommage, il aurait aimé savoir où il avait caché Jenny pendant la fouille de la police. A la place, quelques messages de détresse sur son répondeur. Des gens qui attendaient qu’il leur sauve la mise. Leur cas pourrait attendre encore quelques jours et ils n'en seraient que plus généreux.

Il envoya un court fax à David « Demain, j’aurais des réponses que je vous transmettrai et alors notre contrat sera terminé. Rendez vous au même endroit que la dernière fois, à la même heure. »

Sur ces bonnes paroles, il travailla un assez long moment avant de se plonger dans l’actualité. Il vérifia que tout était en ordre dans ses affaires puis passa le reste de sa soirée à jouer à des jeux d’argent en ligne. Lorsqu’il quitta les tables, assez mécontent, il était bientôt trois heures du matin et il y avait plutôt intérêt à ce que ça suffise.

Kévin Clars.

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MessageSujet: Re: Où est Jenny ? [quête solo terminée] Où est Jenny ? [quête solo terminée] EmptyJeu 13 Sep 2012 - 21:47
~~~~~~


Le renard gris fut assailli par des odeurs puissantes dès son réveil. Avant que ses yeux ne s’ouvrent, son odorat spécial déterminait déjà la source de chaque effluve. Du sang, de la fumée de bois humide provenant d’un feu dont on entendait le crépitement, de la sueur, des défécations animales. Un cadavre pourrissait, assez loin de là. A cette pensée, son cerveau lui envoya une décharge assez puissante pour le faire sortir de son état pâteux instantanément et il ouvrit brusquement les yeux.

L’endroit était sombre, il faisait nuit mais les étoiles se détachaient nettement sur la voûte céleste. Un gros foyer central illuminait une petite clairière perdue au milieu de pins immémoriaux qui masquaient la vue. Autour du feu se tenaient divers rêveurs accoutrés en tenues apaches jusqu’au torse, ainsi que des créatures des rêves à l‘aspect similaire. Une sorte de chaman autochtone présidait la réunion. Sa carrure était impressionnante, il avoisinait les deux mètres cinquante et fait notamment plus étrange, il présentait beaucoup de similarités avec un ours sans en être un tout à fait. Il se tourna vers Nedru tandis que ce dernier se mettait lentement en garde.


-Je n’attendais plus personne. Nous allons commencer. N’aie pas peur, tu es libre de t’en aller si tu le souhaites.

Nedru identifia Kévin dans la foule avec un soulagement qui lui dessina sur la joue son rictus habituel. Comme tous les autres, Kévin fixait le feu d’un air absent et son corps comme les leurs était parcouru de peintures de guerre. Une musculature impressionnante. S’il participait, Nedru se devait de le suivre. Il se détendit.

-J’aimerai me montrer digne moi aussi. son instinct lui soufflait que ces mots étaient les bons.

-Hum.. Très bien… Avant que tu prennes ta décision, je me dois de t’expliquer de quoi il en retourne. Pour…hum ! résumer, vous devrez survivre dans les Cavernes de l’Epreuve afin de montrer que vous êtes aussi braves que des hommes faits. Vous n’avez pas le droit de vous entretuer, mais vous pouvez …vous mettre des bâtons dans les roues si je puis dire. Les meilleurs seront récompensé, mais nous observerons tous les participants, il n’y a pas de honte à échouer avec panache. L’ennemi est parfois plus fort… Vous saurez quand vous serez arrivé au bout.

Nedru redoutait qu’on lui dise ça mais d’une certaine manière, il s’y attendait. Seule l’odeur de cadavre à l’intérieur de la grotte le rebutait réellement.

-Je suis prêt.
-Très bien, nous allons te préparer pendant que les autres pénètrent dans les Cavernes. Apprêtes-toi comme tous les autres.
-Aucun problème.

L’analyste était aussi froid qu’à son habitude, mais sans mépris aucun. Il ne dédaignait pas particulièrement cette créature en face de lui, du moins pas pour le moment, malgré la profonde stupidité de son rite initiatique. Il lui fallait généralement plus de raisons, même s’il en trouvait très rapidement -plus rapidement que quelqu’un à l’égo relativement normal. Il ôta manteau, chemise et chaussures en guettant du coin de l’œil un Kévin amorphe. Tous n’entraient pas dans la caverne en même temps, un laps de temps était laissé à chacun pour pénétrer dans la caverne en paix. Les derniers à partir étaient évidemment désavantagés et l’ordre avait donc été tiré au sort. Mais le temps de battement, d’environ cinquante secondes, n’avait rien d’exceptionnel. Il s’agissait probablement de cavernes labyrinthiques si la chose était bien faite. L’analyste n’y serait peut être pas si désavantagé …

Il se laissa peinturlurer le corps et le visage sans broncher. Lorsque Kévin fut hors de vue, il s’attarda sur les autres. Les rêveurs ne poseraient pas de problème. Les créatures des rêves en revanche , malgré leur aspect humanoïde, semblaient liées à des animaux totémiques variés et étaient toutes intrigantes, certaines semblaient carrément dangereuses.

Nedru entra en dernier comme son ordre d’arrivée autour du feu le suggérait. Il pénétra dans la grotte, où régnaient des odeurs puissantes d’humidité, de moisissure et des relents de cadavres en putréfaction. Il laissa la persistance rétinienne cesser de faire son boulot après avoir mit un pied dans la caverne qui n’était absolument pas éclairée. Au bout d’environ trois minutes, ses yeux commencèrent à s’accoutumer et il distingua plus ou moins clairement grâce à des rais de lumières lointains et quelques plantes fluorescentes. Le chemin se divisait immédiatement en trois branches.

Au bout de l’une d’elle, à droite, il avait entendu quelqu’un gémir faiblement des plaintes. Il élimina le chemin sans se poser plus de questions; soit celui qui était passé là était tombé sur quelqu’un d’agressif, soit sur un piège. Si ce n’était pas le cas, alors les plaintes étaient un piège en soi et il n’avait aucune raison de vouloir s’y rendre. Et puisque l’altruisme ne se comptait pas au nombre de ses qualités, il laissa là la créature agonisante.
Il n’avait aucune raison de préférer le chemin du milieu à celui de gauche. Excepté l‘odeur de cadavre qui se dégageait du centre. C’était trop gros; le chemin central était déjà statistiquement le plus évité, alors cette odeur en plus ? Il s’y dirigea en courant aussi silencieusement que possible. Il faisait confiance à ses sens aiguisé et son instinct surnaturel pour l’avertir de l’imminence d’un danger. Et trouver Kévin rapidement était sa priorité. Il lui proposerait son aide, gagnerait facilement sa confiance de rêveur déphasé et l’interrogerait proprement.

Le Gris déboucha rapidement sur une salle assez vaste, illuminée par un puits de lumière qui donnait immédiatement sur un bassin d’eau naturel, où jouaient les éclats de lumière qui illuminaient la grotte de reflets aériens. Le sol était jonché de débris de bois peints de couleurs vives. Des sortes de totems, avant d‘êtres réduits en tas d‘allumes feu par quelqu‘un d’un brin colérique. Il devait s’agir de pièges qui avaient été… déjoués ? Passer en dernier comportait des avantages. Il leva les yeux, intrigué par la source lumineuse; il faisait nuit l’instant d’avant, cette lumière ne pouvait pas être celle du soleil. Ce fut une erreur. Alors qu’il détournait le regard, il constata qu’il était à nouveau aveugle. Il entendit quelque chose bouger faiblement non loin et se mit discrètement en garde. Il avait suffisamment bien retenu la topographie de l’endroit pour se placer directement dos au bassin, afin d’éviter une attaque furtive de ce côté.


-Pas si stupide finalement !

La voix, presque un aboiement, venait de sa droite. Il se tourna dans cette direction et entendit l’autre courir vers lui. Il ne voyait toujours rien. Il se jeta sur le sol à sa droite au dernier moment, dans l’espoir d’éviter l’attaque inévitable et se releva après une roulade fluide. Les arts martiaux d’autodéfense avaient au moins le mérite de mettre l’accent sur l’apprentissage de ce genre de choses. Il se tourna vivement dans la direction présumée de son agresseur et croisa les bras devant lui. Une idée remarquable, qui lui évita de se faire écraser le nez par un coup de pied assez faible. Son ennemi avait dû l’improviser suite à son esquive et le coup manquait de puissance. Tout de même, bien que son adversaire soit un pitoyable lâche usant de techniques qu’il n’aurait pas désavoué lui-même, il n’avait pas affaire à n’importe qui. Il se releva d’un bond en arrière et sentit un second coup de pied lui passer au ras des jambes.

-Tu es un Voyageur n’est ce pas ? Désolé, mais je ne peux pas te battre à la loyale. Et je ne peux pas te laisser affronter les miens.

Il se fit soudain silencieux. Puis un objet de petite taille vint éclater la surface de l’eau, projetant des échos dans la salle arrondie qui agit comme une caisse de résonnance. Un coup de poing fut accueilli par les abdominaux de Nedru à peu prêt au même moment. Un coup puissant, mais le Renard s’était préparé à encaisser quelque chose de plus désagréable et cette bonne surprise le fit presque sourire. Il ne voyait toujours rien, et la riposte lui était impossible. Comme souvent, il n’avait sa langue que pour seule arme et mentit de façon éhontée, dissimulant facilement sa haine sous jacente.

-Je n’affronterai personne ! Je n’ai aucune raison de vous blesser. C’est un…

Impossible d’avouer qu’il était ici pour interroger un rêveur. Ce serait très probablement perçu comme un affront et la négociation tournerai court.

-Un Voyageur qui m’a fait venir ici. Je suis venu l’empêcher de vous faire du mal, il est dangereux.

Pour toute réponse, l’autre lui envoya un coup de pied vers le genoux. Mais Nedru s’était déjà écarté d’un bond en arrière. Il continua de reculer prudemment pour pousser l’autre au dialogue mais son dos butta contre un mur de pierre humide.

-Ecoute, je n’ai pas encore utilisé mon pouvoir contre toi, n’est ce pas ? Si j’avais voulu te tuer, tu serai déjà mort.

Et le timbre de sa voix, lugubre, qui résonna dans la caverne, n’allait pas démentir cette affirmation.

-Tu bluffes !

L’aboyant personnage lui envoya une lourde pierre au visage tandis qu’il projetait son pied de toutes ses forces en direction du Gris. Lequel avait regagné un peu de sa visibilité. Il esquiva les deux attaques d’un bond sur la gauche et saisit au passage le pied de son adversaire. Il attira vivement la jambe de son adversaire a sa suite et entendit une chute lourde suivit du bruit caractéristique d’une tête qui se violement cogne contre le sol. Mais il n’avait pas l’intention de se jeter sur cet ennemi. Premièrement parce qu’il n’avait rien sous la main pour le mettre hors d‘état de nuire définitivement et deuxièmement parce qu’il se savait surveillé par les garants du bon déroulement de cette épreuve absurde qui l’empêchait de mettre à mort quelqu’un d’aussi inamical. Et puis après tout, s’il voulait rester cohérent avec ce qu’il venait de dire, autant faire mine d’être miséricordieux. Il s’efforça donc de dissimuler son rictus narquois.

A la place, il s’écarta d’un pas et vit l’ombre au sol relever… mais au lieu de l’attaquer elle s’enfuit subitement à une vitesse qu’il n’aurait pas soupçonné. Ses sens pouvaient lui jouer des tours, mais il aurait juré qu’elle avait rétréci et surtout, disparu en courant sur quatre pattes. Les créatures de ce royaume possédaient donc ce genre d’aptitude ?.. La relation particulière qu’entretenaient les amérindiens et leurs esprits totémiques expliquait certainement la naissance d’un lieu comme celui-ci. Si c’était le cas (et il ne se trompait que rarement quand il disposait d‘autant d‘éléments) mieux valait se méfier. Il aurait aimé pouvoir continuer sa route d’un pas plus circonspect mais Kévin n’attendrait pas.

Aussi emprunta-t-il le chemin sur lequel l'ombre l’avait précédé en trottant prudemment (de nombreux autres passages étaient disponibles mais il fit confiance à son agresseur pour savoir où il allait). A nouveau l’odeur infecte l’assaillit et lui fit monter la bile aux lèvres. Bientôt, un autre embranchement. Les deux chemins menaient vers des lieux identiquement sombres et silencieux, cependant, tandis que l’un montait légèrement, l’autre descendait. Après une courte réflexion, Nedru choisit de descendre sur le chemin de gauche. Les aspérités rocheuses du côté sinistre, il les longerait donc consciencieusement à partir de maintenant pour éviter de se perdre, règle élémentaire dans tout labyrinthe qui se respecte. Il y eu une autre bifurcation qu’il aurait suivie s’il avait placé sa main sur le mur de droite, mais il ne l’emprunta pas pour rester fidèle à sa règle. L’odeur était encore plus forte ici, des courants d’air putrides venaient l’assaillir à intervalles réguliers comme pour le forcer à rebrousser chemin. Ce ne serait probablement pas le chemin emprunté par Kévin, mais après tout, quelque part, les chemins devaient bien mener au même point d’arrivée puisque des épreuves semblaient tout de même aménagées partout. Et puis, il fallait songer à sa propre survie à partir de maintenant. Il détestait avoir à se dire ça, mais Kévin pourrait attendre une nuit et tant pis pour les délais qu‘il avait indiqué à David. D’ailleurs, l’analyste l’ignorait mais le chemin montant décrivait une large courbe qui ramenait à l’un des trois embranchements du départ. Il était sur la bonne route.

Cette fois, lorsque les parois du boyau dans lequel il progressait s’élargirent, il fut privé de toute source de lumière. La salle devant lui était comme un trou béant. L’odeur… Indéfinissable. Nedru ne put s’empêcher de vomir tant les effluves étaient insoutenables. Il jura mentalement avant de retourner sur ses pas d’une démarche mal assurée pour cueillir quelques plantes phosphorescentes qu’il fourra toutes dans sans poches afin de se générer une petite aire lumineuse autour de lui, plus une qu’il gardait tendue pour éclairer ce qu’il souhaiterai inspecter en détail. Il n’aspirait plus l’air qu’à petites goulées dégoutées et en fit une large provision dans ses poumons avant de retourner vers la salle obscure.

Il ne tarda pas à constater, à la lueur des végétaux récupérés plus avant, que l’endroit était rempli de cadavres. De bêtes sauvages pour ce qu‘il en constatait, principalement d’herbivores, mais tout de même.. c’était révulsant même pour quelqu’un à l’esprit aussi froid et malsain que lui. Jamais il ne serait allé marcher sur un charnier de bon cœur. Peut être aurait-il mieux valu se lancer dans la pièce sans savoir sur quoi il marchait. La main gauche toujours posée contre la paroi, il posa donc son pied sur les entrailles tièdes et poisseuse en contenant la bile qui remontait jusqu‘à sa gorge. Ses sens n’étaient pas particulièrement développés (rien à voir ave l‘odorat d‘un animal, heureusement), mais chaque odeur imprimait dans son esprit l‘image qui s‘y associait, et parvenait parfois à se coller jusque sur son palais qui détaillait alors avec sa précision habituelle toutes les saveurs des effluves. Il retint son souffle. Il évita les chairs gonflées des cadavres remplis de gaz de décomposition pour éviter de les crever, ce qui aurait immanquablement laissé s’échapper des volutes nauséabondes et s’enfonça donc vers le fond de la salle.

Et puis le souffle vint à lui manquer; il marchait en apnée depuis trop longtemps. Il courut le long de la paroi pendant un temps qui lui paru durer l’éternité. Il avait décrit une large courbe et s’attendait à retrouver son point de départ d‘un instant à l‘autre. Alors qu’il commençait à sentir le sang lui tambouriner aux oreilles, il sentit un trou trop net dans la paroi, à hauteur de visage; là où glissait sa main contre le mur. Un rapide examen lui apprit que cette aspérité était large d’un mètre cinquante et assez profonde pour s’y glisser. Quant à la hauteur, il n’arrivait pas la mesurer. Le sol à cet endroit était normal, c’est-à-dire rocheux et dépourvu de toute trace de carcasse décomposée (!). Il s’y hissa difficilement, à bout de souffle. Nedru avala goulûment l’air vicié dans ses poumons douloureux et s’autorisa à vomir une deuxième fois avant de poursuivre péniblement sa route...Il découvrit un boyau parfaitement sain et relativement bien taillé. Un passage secret ? Un faible ruissellement s’entendait, plus loin. Jamais plus il ne traiterai les odeurs huileuses de snacks graisseux « d’attentats olfactifs ».

A peine quelques pas plus loin, le boyau était obstrué par une cascade absolument lisse qui se déversait dans une faille étroite au sol. De l’autre côté, on apercevait faiblement les lumières caractéristiques des plantes lumineuses. En fait, trouver cet endroit nécessitait normalement d‘aller au centre du charnier pour y trouver un indice, qui vous charbiatait pour vous guider vers l’endroit, mais sa technique était finalement à l‘épreuve des énigmes -il ne se serait pas abaissé à appeler ça de la chance. La salle derrière lui était immense, peut être reliée à de nombreux autres chemins… Mais il était désormais persuadé d’être sur la bonne route; de l’autre côté, l’odeur serait bien moins forte car l’eau agirait comme un barrage olfactif dans la caverne. Il se trouverait alors du côté « sans odeur », à l’opposé de l’entrée d’où se sentait déjà les relents du charnier. Nedru s’engagea sous la cascade glacée avec plaisir. Il se frotta vigoureusement les jambes puis s’engagea de l’autre côté, plus que ravi de constater qu’il ne s’était pas trompé. Ici ne se sentait qu’une puissante odeur d’humidité et de terre rocheuse.

Il ne pouvait plus se permettre de trotter. L’endroit était sombre et les plantes qu’il avait amassées ne suffisaient plus qu’à éclairer au maximum deux mètres devant lui. En fait, même les lumières qu’il avait aperçu au-delà de la cascade étaient affreusement loin et… elles…

Parlaient ? Il entendait faiblement discuter au loin. Alors qu’il se rendait compte que les lumières bougeaient, il comprit. Loin devant lui se trouvaient d’autres concurrents, aussi visibles pour lui qu’il l’était pour eux. Ils semblaient être ensemble. A bien y réfléchir, il n’y avait là rien d’illogique. Personne ne les avaient obligés à se battre; d’après les règles telles qu’on lui avait énoncée il suffisait d’arriver au bout de l’épreuve, y parvenir à plusieurs n’avait rien d’éliminatoire. Restait à espérer qu’ils ne soient pas agressifs. Il ne prendrait pas le risque de le vérifier par l‘expérience. A la place, il disposa les champignons qu’il possédait dans ses poches tous les trois mètres sur le sol et se plaça à l’extrémité à l’opposé des lueurs , au loin, dans l‘ombre. S’ils prenaient l’initiative d’aller à sa rencontre, il aurait le temps de les voir arriver sur une vingtaine de mètres.

Au bout d’un moment, l’une des sources lumineuse s’approcha.


-Très malin. C’est toi Coyote ? Nedru aurait aimé ne pas répondre pour se délecter de sa position privilégiée sur le nouveau venu, mais c’était hors de propos. Il ne comptait pas attaquer par surprise son adversaire, juste entamer un dialogue. Et les choses se déroulaient selon son plan.

-Non, ce n’est pas Coyote. Je ne suis pas venu pour me battre, vous êtes trois et je suis seul. J’aimerai unir mes forces aux vôtres si possible.

L’autre réfléchit un moment. Un peu trop long. Il n’avait manifestement pas l’esprit assez vif pour prendre ce genre de décisions au débotté. Finalement il accepta et s’avança dans la lumière. Comme l’avait espéré Nedru, c’était l’une des créatures des rêves à l’aspect le moins dérangeant. Son épaisse tignasse brune ainsi que les angles de son visage rappelaient une sorte de bison des plaines, aussi l’analyste le surnomma-t-il « Bison » sur le champ. Il s’avança lui-même dans la lumière en gage de bonne volonté.

-J’ai deux de vos « rêveurs » avec moi. Je sais qu’ils ne peuvent pas réellement mourir. Désolé de le dire, mais je compte plus ou moins m’en servir comme d’appâts.
-Ca m’est égal.

Et c’était vrai. S’il avait croisé la route de rêveurs, il en aurait fait de même. Ceci dit, il n’avait pas encore affronté d’épreuve nécessitant de sacrifier des pions. Bison en savait certainement plus puisqu’il ajouta;

-Les tests d’orientation sont terminés. Maintenant ça va se corser.

Le Renard ne fit pas de remarques. Il avait été incroyablement chanceux jusque là. Il ramassa ses champignons et rejoints les deux autres rêveurs en silence. Ceux-ci étaient disons… effrayés. Leur songe virait au cauchemar. Il ignorait comment la créature des rêves avait pu leur faire passer le charnier mais c’était une assez belle performance.  Bison les calma d’une voix sereine et autoritaire, comme il l‘avait peut être fait quelques mètres plus loin, derrière la chute d‘eau. Il était manifestement habitué à commander malgré son inaptitude à prendre des décisions rapidement. Ils poursuivirent leur route dans un silence pesant, à la lumière déclinante des champignons luminescents, pressant anxieusement le pas. S’il tenait ce Kévin ! Faire des rêves aussi absurdes ! On a pas idée de vouloir participer à un rite initiatique amérindien, Nedru haït sur le champ les gens dont le fantasme était de se mettre à l‘épreuve… Enfin, il ne cauchemardait pas sur les terres d’un seigneur dangereux en périphérie du monde onirique, l’analyste pouvait toujours s’estimer satisfait…

Jusqu’à ce qu’ils entendent de faibles appels à l’aide. L’homme-bison se précipita en avant. Le Gris le suivit à distance raisonnable, trainant à sa suite deux rêveurs hagards. Pour les rassurer, il se tourna vers eux, un grand sourire aux lèvres.


-C’est drôle non ?

Il acheva sur un clin d’œil. Et ils s’en contentèrent fort bien, accélérant soudainement leur rythme comme si la perspective de trouver quelqu‘un agonisant était devenue soudainement réjouissante ! Les rêveurs désorientés n’étaient pas compliqués à manipuler et heureusement, Nedru était naturellement devenu versé dans cet art depuis un moment. Leur esprit semblait incapable d’approfondir une idée, ils dissimulaient mal et pensaient tout aussi bien. Qu’il mette seulement la main sur le jeune Clars et Jenny serait à la portée de ses mains… Pour le moment, là n’était pas la question.

Plus loin, Bison était agenouillé auprès d’un de ses confrères, allongé et visiblement au plus mal, que l‘éclat fluorescent illuminait d’une lueur jaune-verte inquiétante. Nedru ne saisit pas un traitre mot de ce qu’ils se disaient, mais le blessé semblait mettre en garde son camarade. Ils n’avaient pas l’air de bien s’entendre et se regardaient d’un regard qui voulait dire respectivement dire« je préfèrerai crever que de te laisser me voir dans cet état » et Bison semblait répondre « je regrette que tu sois parti seul ». Il n’avait aucune raison de s’imposer entre eux. Finalement, celui qui était par terre parla un langage compréhensible, pour Nedru;


-Prenez les armes que j’ai récupéré sur les démons-totem. Quelque chose rôde dans les parages, et ses épines sont empoisonnées. Partez maintenant.

Il rétrécit jusqu’à prendre la forme d’un loup blanc dont le pelage était maculé de taches écarlates et se recroquevilla faiblement comme un vieux chat qui se cache sous une terrasse pour lécher ses plaies et laisse au sommeil et à l’inaction le soin de le guérir. La rançon glorieuse de l’héroïsme. Le jeune analyste contint un reniflement hautain. Démon totem, hein ? Encore quelque chose qu’il n’avait pas croisé. Les débris dans la salle au bassin ? Sans doute…
 Bison ramassa les deux lances qui traînaient plus loin, en garda une et en offrit une à Nedru pour le grand soulagement de ce dernier. Puis il s’avança d’un air déterminé dans le mince tunnel sans considération pour les deux Rêveurs derrière lui, complètement perdus. « On laisse le loup ici ? Pourquoi on a pas de lances nous ? »… Nedru fut subitement impatient qu‘ils servent au rôle qu‘on leur avait attribué.

Dans le tunnel, l‘on sentait que quelque chose clochait sans pouvoir en déterminer la cause. Ici, la terre était molle et l’on s’enfonçait légèrement à chaque pas. Se lisaient sur le sol, à la lumière quasi inexistante, les traces du loup, dans un sens puis dans l’autre. Nulle trace de ce qui l’avait attaqué. Certaines empreintes, cependant, étaient striées comme si on les avait labourées avec un petit bâton ou qu’on avait tenté de les effacer en trainant derrière soit une branche d’arbre.
« Ses épines » n’était donc pas une métaphore, ils avaient affaire à une sorte de monstre végétal ? Les marques disparaissaient parfois sans raison. Bison aussi avait du le remarquer car il jetait souvent des coups d‘œil anxieux lorsqu’elles se perdaient dans le sol. Atmosphère pesante. Les Rêveurs passaient derrière. Pas très efficace comme chair à canon, mais ils n’auraient jamais accepté de d’ouvrir la voie dans ces conditions. On leur avait même confié le gros des réserves de lumière pour les apaiser. Des individus pathétiques qui n’avaient rien à faire dans ce genre de songes…. (Peut on juger de prétentieux le rêve d’autrui ? Non. Mais Nedru ne s’en priverait pas. )

Soudain, l’un d’eux poussa un cri effroyable. Le genre de cri que l’on s’attend à entendre dans un film d’horreur, que l’on attend tellement en fait qu’il vous fait beaucoup plus peur qu’il ne devrait. (Les grilles pains font le même effet aussi, parfois..) Un cri qui fit se dresser les cheveux sur la tête de Nedru et ce bien malgré lui; ce n’était pas faute de s’y être attendu. Que le monstre surgisse de devant ou pas, il les prendrai par surprise vu l’état de la luminosité; les rêveurs auraient donc forcément eu cette réaction.
Ce cri était pourtant très mérité. Le rêveur en queue de file s ’était fait happer au niveau des mollets, lâchant la grappe de champignons phosphorescents qu’il tenait dans l’action, champignons qui se dispersèrent le long du tunnel à mesure que la créature le tirait vers les profondeurs de la grotte, sourde à ses appels au secours hurlés d‘une voix rendue inhumaine par les échos. Personne ne réagit, sous le choc. Rapidement Nedru coupa le silence;


-Pressons. Il ne la retiendra pas longtemps.

Bison s’était retourné, l’air indécis. Le jeune homme devait donc prendre les choses en main. Il indiqua du bout de sa petite lance la direction du tunnel vers laquelle ils devraient poursuivre. Si la créature mettait à mort le Rêveur rapidement plutôt que de le torturer un peu pour se mettre en appétit, elle reviendrait vite à la charge, ne trouvant que peu à se nourrir sur des restes de fumée onirique. Des cris lointains indiquaient qu’elle n’était pas encore décidée. Peut être le mettait elle en pièce pour se faciliter la digestion ? L’imposant humanoïde à ses côté semblait perdu dans ce genre de réflexion puisqu’il ne bougeait toujours pas. Aussi Nedru dépassa le Bison et courut rapidement dans le tunnel en prenant garde à ne pas se fouler quelque chose dans les ténèbres. Si la chose était derrière eux, il préférait laisser deux personnes entre elle et lui. Pour sauver les apparence, il cria « Courrez ! » mais poursuivit sa route sans se soucier de leur réaction. Il les entendit bientôt sur ses talons, tandis que les cris au loin s’étaient tus. Ils étaient parvenu à la même conclusion que lui.

Nedru n’en était pas certain, mais il lui semblait que le tunnel allait en s’élargissant. Il força encore l’allure, le bout des doigts de sa main gauche frottant doucement le mur. Oui, les parois s’écartaient peu à peu ! Le monstre, quel qu’il soit, était à son avantage dans ce genre d’environnement exigu, mais s’ils arrivaient jusqu’à une pièce plus vaste, ils pourraient peut être profiter de leur surnombre.


-Il est juste là !!

L’intonation dans la voix du Rêveur trahissait sa panique. Et Bison, pour une raison qui échappait à Nedru (peut être souhaitait-il faire bonne figure auprès de ceux qui d’une manière ou d’une autre, les surveillaient) n’avait pas l’intention de le laisser se faire tuer de la même manière que l’autre. Il se retourna, laissa le Rêveur le dépasser et lança puissamment la lance dans la seule direction d’où pouvait venir le monstre. Du moins, c’est ce que supposa Nedru lorsqu’il entendit l’étrange cri derrière lui et l’exclamation de victoire de l’autochtone. L’analyste ne se laissa pas perturber pour autant et continua sa course, bientôt à bout de souffle. Et puis, il aperçut un mince filet de lumière, au loin, porteur d’espoir. Au même moment, Bison poussait un cri de douleur. L’analyste se retourna et continua à marcher à reculons. Il devait tout de même se soucier de son seul allié.

-Qu’est ce qu’il se passe ?
-Il m’a blessé puis il a… disparu. Comme s’il était rentré dans le sol.
-Appuies sur la blessure. Il y a de la lumière là bas, allez !

L’autre grogna quelque chose de manifestement impoli. Peu importait pour le moment. Ils se dirigèrent vers la source lumineuse à un rythme dramatiquement trop lent (ils faisaient de leur mieux, la faute en incombe uniquement à la taille immensément longue du boyau, le monstre avait bien choisi son endroit). Ils pouvaient maintenant voir se détacher une pièce au loin, dans un cadre lumineux d’environ un mètre sur un. C’était énorme compte tenu de la distance à laquelle ils se trouvaient encore de la pièce. Les murs et la voute de ce qui avait été un simple tunnel à la base s’était donc considérablement écartés. Leur propre source de lumière s’était éteinte depuis un bon moment. C’est donc sous ce seul éclairage, en contrejour, qu’ils virent se détacher devant eux la silhouette de la créature végétale qui s’extirpait de terre dans un silence mortel et un bouillonnement de terre battue étrange. D‘une taille pas si impressionnante, des lianes épineuses fouettaient l’air sur des distances beaucoup plus grandes et problématique. Pourquoi avait-il fallu qu’elle arrive par devant ? Nedru avait fait le mauvais choix en prenant soudain la tête: il s‘en maudit intérieurement. Ou bien y avait-il plusieurs de ces choses ? Savait-elle qu’ils la voyaient ? Elle restait là, dans le passage, à étirer ses longs tentacules comme une araignée tisse sa toile en attendant qu’un insecte vienne s’y coller. Nedru écarta le bout de ses doigts de la paroi à sa gauche et se décala progressivement sur la droite, aussi silencieusement que possible, pour tenter de s‘écarter du monstre ou en mesurer l‘étendue actuelle. Bison et le rêveur le rattrapèrent à ce moment là, et virent tout naturellement la même chose que lui. Mais le rêveur jugea bon de sauter à pied joint dans le plat en criant; « LAAAAAAAAAA ! ». La créature elle-même sembla sursauter, puis s’activa. Elle se tourna vers l’intrus le plus proche d’elle; Nedru -qui cracha un juron- replia ses lianes tentaculaires et fouetta l’air dans sa direction.

Le jeune homme ne pu qu’enchainer les bonds en arrière pour tenter de garder le monstre sous un éclairage favorable. S’il se mettait à fuir vers la lumière, il se placerai lui-même en contrejour et n’aurait plus la moindre chance d’apercevoir la mortelle créature. Son plan actuel était uniquement de laisser suffisamment de place aux autres pour qu’ils puissent passer et attaquer de dos le monstre. Ce qu’ils firent bientôt partiellement; passer. Voilà qui était fait. Attaquer ne sembla pas leur venir à l’esprit et ils s’enfuirent sans demander leur reste dans la foulée. Ils ne le voyaient probablement même plus. Le Renard cria quelque chose à leur adresse mais ils ne se retournèrent pas. Il les maudit entre ses dents.

Il fallait qu’il trouve une solution, et vite. Mais le monstre en face ne lui laissait pas le temps de réfléchir; la petite lance en bois qu’il agitait devant lui repoussait les lianes de plus en plus souvent, signe non pas qu’il s’améliorait, mais que les attaques devenaient de plus en plus précises. La créature approchait. Mais si lui-même continuait de reculer, jamais il n‘arriverait à se sortir de ce guêpier. Pour peu qu‘un deuxième monstre végétal se trouve dans son dos, il était fichu. Les attaques se faisaient de plus en plus rapprochées, Nedru serait bientôt obligé de courir dans le sens opposé s’il voulait éviter la confrontation. Et il ne pouvait pas se le permettre, entre autre parce qu’il était épuisé et surtout parce que ça ne le mènerait nulle part. Il ne pouvait pas non plus se battre. Il vit se détacher de la lumière au loin, derrière la bête. Au même instant, sa lance se brisa sous la puissance d‘une attaque trop brutale. La lumière approchait, on entendant comme un galop puissant.. Nedru roula sur le côté pour éviter une nouvelle attaque, ramassa anxieusement un bout de lance à tâtons et continua à parer les lianes in extremis avec un talent qu’il ne se connaissait pas. Les attaques devenaient plus prévisible à mesure que le combat s‘étirait. La faute à son pouvoir, peut être ? Enfin, la cavalcade se fit plus audible, la lumière plus puissante et la créature végétale arrêta soudainement, comme pour sonder l’air ou «voir » (quel que soient les sens utilisés) ce qui lui arrivait sur le coin du nez. Nedru en profita pour trancher un tentacule qui vibrait non loin, d’un geste désespéré. Le monstre poussa le même cri étrange que l’autre fois, forçant le jeune homme à reculer. Puis la lumière se posa sur le monstre et il hurla de plus belle, fouillant le sol à une vitesse ahurissante pour s’enterrer à nouveau tandis que ses tentacules continuaient de fouetter l’air rageusement comme pour empêcher quiconque de le blesser en cet instant. L’analyste n’avait pas cette intention, il recula prudemment et n’eut que le temps d’estimer que la créature ressemblait à une taupe géante, complètement recouverte de ronces et de lichen, avant qu’elle ne disparaisse tout à fait. La lumière était donc son point faible. Bison, sous sa forme animale (de bison, Nedru, comme à son habitude ne s’était pas fourvoyé) était venu à son secours, la gueule chargée de cristaux qui irradiaient une douce lumière bleue. Le Renard le remercia d’un geste de la tête. Les mots étaient inutiles; il venait de se faire sauver la peau, aucun mot ne serait à la hauteur. Il ne pouvait s’empêcher d’en éprouver un profond soulagement malgré l’irritante sensation d’être redevable à quelqu’un. Ensemble, ils rebroussèrent chemin en courant jusqu’à la salle suivante. Qui sait si quelque chose d’autre tapi dans les ténèbres n’allait pas, lui, profiter de la lumière qui les illuminait pour les attaquer ?


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Nedru Etol
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MessageSujet: Re: Où est Jenny ? [quête solo terminée] Où est Jenny ? [quête solo terminée] EmptyJeu 13 Sep 2012 - 23:46
Ils ne le sauraient jamais. L’autre pièce était immense, doucement illuminée par quantité de petits cristaux bleus dont la lumière était encore diffusée par une légère brume qui régnait dans la pièce, créant des reflets d’arc en ciel ici et là. Des geysers jaillissaient plus loin, ils diffusaient alors un petit nuage de brume avant d’être reprit en cœur par des dizaines de jumeaux et laissaient alors de l’eau clapoter doucement, comme agonisante entre les intervalles d’éruptions.

Nedru examina son corps. Aucune trace de blessure; c’était tout simplement miraculeux. Bison de son côté avait repris sa forme humaine et lavait consciencieusement la profonde plaie qui lui dessinait une fresque sur le bras, plongeant par intermittence sa bouche à même les chairs pour en sucer les traces de poison. Le rêveur, de son côté, gémissait en se balançant d’avant en arrière, assis dos à un imposant cristal. Bison s’arracha finalement un pan de vêtement et se garrotta fermement le bras. Il était extrêmement pâle malgré la dureté qu’exprimait son visage.


-Aucun pouvoir qui pourrait servir, Voyageur ?
Nedru secoua la tête. -Non, je ne me serai pas privé le cas échéant. Merci d’être venu me chercher.
-Um..J’espérais que vous pourriez vous montrer utile. Le poison va se répandre rapidement, je vais devoir compter sur vous pour la suite de toute façon.

Nedru hocha la tête. Compte là-dessus… Le Renard avait horreur d’en avoir mais il ne payait pas forcément ses dettes, surtout quand le créancier était aux portes de la mort. Il évita d’en faire part à Bison. A la place, il lui proposa de se reposer un instant, derrière des colonnes de cristal, à distance respectable des geysers qui diffusaient une douce moiteur et par lesquels il n’aurait pas été plaisant d’être éclaboussé.

Bison ne tenait plus debout. Il vacillait et s’affala lourdement sur ses fesses avant de se reposer en fermant les yeux, son front couvert de sueur posé entre ses mains. Nedru se demanda si les effets du poison allaient se dissiper rapidement. C’était très improbable…

Alors qu’il s’apprêtait à abandonner là ses deux « alliés » devenus inutiles, il entendit des bruits de pas dans leur dos, une cavalcade suivie de cris de joie. D’autres avaient traversés le tunnel et s’en étaient tirés. Il risqua un œil derrière la colonne. Des rêveurs, uniquement. Impossible ! Ils avaient dû bénéficier du fait que leur groupe ait attiré et blessé la créature juste avant eux.. Et Kévin Clars était parmi eux ! Nedru sauta sur l’occasion, mettant de côté toute prudence. La nuit toucherait à sa fin dans le monde réel, ils se réveilleraient bientôt. Et trois rêveurs ne lui poseraient pas de problème, même s’ils souhaitaient se montrer agressifs… (Il se battait assez mal mais tout de même, il bénéficiait désormais d’une solide expérience. Et il était beaucoup plus fort dans Dreamland que dans la vie réelle.) Il se concentra un instant et son pouvoir lui souffla les mots à prononcer. Puis il sortit pour de bon de sa cachette;


-Kévin, Jenny est en danger ! Tu sais où elle est ?

Un rêveur, dans cette situation stressante et dangereuse, s’il protégeait et cachait quelqu’un dans le monde réel, tomberait bêtement dans le panneau. Même s’il n’affirmait rien, sa réaction en dirait long aux yeux de l‘analyste. Pour toute réponse, les trois rêveurs se mirent sur la défensive.

-Qui t’es ? De quoi tu parles ? Comment tu me connais ?

Quelque chose sonnait faux. Le pouvoir de Nedru l’en informa dans la seconde. Kévin savait de quoi il parlait. Ou alors… Ces yeux trop scrutateurs, cette attitude trop naturelle, cette voix claire et distincte.. Et le fait qu’ils aient traversé toutes ces épreuves sans sembler particulièrement blessés ?.. Kévin était un Voyageur ?! Nedru accusa le choc avec difficulté. Non seulement parce que c’était le premier Voyageur que le jeune homme croisait et qu’il avait plus ou moins déjà vu ( ou avec qui il avait été en contact, même indirect ou potentiel… ) dans le monde réel, deuxièmement parce qu’il venait de détruire toute la discrétion de son enquête, et avec, l’enquête elle-même. Cette idée ne lui était stupidement, jamais venue à l’idée. Divers plans pour remédier à la situation naquirent dans l’esprit de l’analyste.

Kévin comprit rapidement. Il hurla aux deux rêveurs qui l’accompagnait de « s’occuper de l’ennemi ». Ils n’eurent pas l’air particulièrement surpris; Nedru devina qu’ils n’en étaient pas à leur première victime depuis le début de l’épreuve. De simples rêveurs… Costauds, certes, mais enfin. Des Voyageurs déguisés, aux aussi ? Nedru esquiva le coup de poing que lui envoya le premier, attrapa le bras de son agresseur au niveau du poignet et frappa violement avec la paume de sa main vers le haut, au niveau du coude. L’articulation se brisa nette. Non; de simples rêveurs. Le deuxième réussit tout de même à lui fourrer un puissant coup de pied dans les côtes pendant ce temps et Nedru s’envola sur quelques mètres, tombant non loin de ses propres alliés. Bison avait saisi la situation et se relevait déjà difficilement, les yeux vitreux, tandis que le rêveur qui l’avait suivi tout du long imitait, bon gré mal gré.


-Oh, tu n’es pas tout seul je vois ? C’est parfait.

Kévin exultait. Il frappa dans ses mains en poussant un cri surpuissant. Il utilisait son pouvoir. Nedru le compris à la manière peu naturelle avec laquelle il venait d’exécuter ses gestes ainsi que de par l’étrange « texture » de l’onde sonore, trop compacte, qui ne se répercuta pas du tout aussi loin qu’elle aurait du...

Et ?

C’est tout ? Le cri était-il censé leur briser les tympans ? Nedru profita de ce que le sbire de son adversaire ne se jetait pas sur lui pour se relever lentement en observant la situation. Rien ne lui semblait anormal. Il n’était pas particulièrement troublé, ses sens étaient toujours aussi alertes que les secondes précédentes… Alors qu..?

Soudain, un puissant fracas dans son dos. Bison venait de jeter le rêveur qui l’avait accompagné tout du long contre une paroi de cristal, laquelle avait littéralement volé en éclat sous l’impact. La victime de l’assaut disparut dans un petit nuage de fumée, la bouche suspendue sur un hoquet de surprise. La mort selon Dreamland. Nedru nota mentalement l’image de ce visage qui disparaissait dans la fumée, les traits figés dans un mélange de surprise et de de haine, cocktail pour le moins inhabituel. Bison, même dans son état, ne faisait pas de cadeau.

Mais le Renard avait d’autres soucis. L’ennemi qui l’avait envoyé voler se proposait de finir le travail, au trot et tout hurlant. En temps normal, rien que l’analyste ne puisse contenir en y mettant un peu du sien, mais cette fois était différente. Le rêveur frappait trop fort, trop vite et compensait son manque de précision par des coups jetés sans aucune logique, comme un animal atteint de la rage, rendant inopérante toute tentative d’analyse. Alors que Nedru parvenait enfin à saisir le poignet de son assaillant, un coup colossal dans l’épaule porté vers le bas le cloua au sol. Sur sa lancée, Bison l’enjamba à peine avant d’envoyer son poing massif dans le nez du rêveur, qui s’écroula plus loin avant de perdre connaissance et de disparaitre. Le rêveur au coude brisé fut réduit au silence par Kévin, qui s’éclipsa discrètement pour ne pas attirer l’attention de Bison plus que nécessaire.

Nedru ne perdit pas de temps pour rouler sur le côté, s’arrachant un cri au passage de son épaule sur le sol, puis se releva sans perdre de temps. Bison était devenu fou. Les rêveurs, alliés et ennemi étaient devenu fous. C’était la clef de l’expression du rêveur avant de « mourir » , du désordre dans les attaques du rêveur ennemi (faute de nom…), du comportement de Bison et de l’attaque sonore de Kévin, qui regardait la scène d’un œil vaguement intéressé. Il rendait les gens fous à lier, et excessivement agressif. Il ne les contrôlaient même pas. Il en faisait des « Berserker », issus d’un autre âge… Lui-même avait été épargné pour une raison obscure qui l’arrangeait bien; cela lui permettait de s’enfuir dans la vapeur dégagée par les geyser là où il se serait probablement jeté sur Bison sans conscience du danger. Mais la créature mi homme mi bête ne l’entendait pas de cette oreille et se lançait déjà à sa poursuite.

S’en suivit la partie de cache-cache la plus insupportable de la vie du jeune homme. Si la vapeur était suffisamment compacte pour le dissimuler, elle restait à des températures insupportables qui, non contente de l’obliger à suer avec abondance, lui ôtaient au passage le loisir de respirer à sa guise. Une sorte de super sauna impromptu. Et si l’idée de voir un Bison fou surgir à quelques centimètre de son visage à tout moment était extrêmement dérangeante, le fait que ces vapeurs s’éparpillaient rapidement l’était encore plus, l’obligeant à rester constamment en mouvement (et il devait produire des efforts surhumains pour que ses pas dans les flaques au sol ne le trahissent pas) pour se diriger d’un geyser à l’autre, sans visibilité, avec toujours le risque de se faire mortellement ébouillanter sur un malentendu, et tout en traversant des brumes dont la température variait de plusieurs dizaines de degrés, lui interdisant toute accoutumance.

Son cerveau, à l’unisson avec son pouvoir, tournait en rond, en vain, cherchant une solution là où il n’y en avait visiblement aucune. Il devait gagner du temps. Bison était bruyant et il aurait été facile de l’éviter si ce dernier ne courrait pas en tous sens, traversant en quelques secondes ce qui demandait à Nedru des minutes entières de pénibles efforts. Plusieurs fois, il avait dû se figer tandis que l’autochtone lui passait devant en expirant comme un soufflet de forge, ne pensant plus qu’à tuer. Sa fin était imminente.

Cependant…Les cavernes menaient quelque part, vers la fin de l’épreuve. L’onde sonore envoyée par Kévin n’avait pas ricoché aussi loin qu’elle aurait du. Signe que son pouvoir était probablement limité dans l’espace. Et Nedru avait suffisamment joué à cache-cache, cherchant des replis dans la roche, pour évaluer où se trouvait la sortie. Il s’y serait dirigé à tâtons s’il l’avait pu, mais les geysers de ce côté restaient insupportablement calme, libérant un champ de vision dégagé sur environ trente mètres. Et Bison continuait ses allers retours… Le Renard attendit donc son heure, puis profita de ce que la sentinelle était à l’opposé pour se jeter vers la sortie. Sa dernière carte. Bison bifurqua dans la seconde et se jeta immédiatement sur lui. Vingt mètres. Cinq de plus et le souffle de Bison était presque sur lui. Il n’y arriverai pas. Ce constat censé provoquer une bouffée d’adrénaline salvatrice n’eut pour autre effet que de ponctuer un plaquage monstrueux qui les envoyèrent rouler, lui et Bison, sur encore quelques mètres. L’épaule meurtrie du jeune homme lui envoya une déflagration de douleur insupportable (au passage, pour la forme…). Bison libéra sa prise et le retourna sans ménagement. Le coup de grâce.


-Qu’est ce qu’il s’est passé ?!

Non ? Sauvé ! Malgré son soulagement, Nedru grogna pour se dégager de l’emprise de Bison…
Il n’était pas censé être sur le point de mourir celui là ? Le Renard ne se sentait pas d’humeur à lui fournir la moindre explication et éluda la question d’un signe de la main. Maintenant qu’il n‘était plus sur le point de se faire tuer, Nedru pouvait à nouveau se rappeler l’échec cuisant dans son enquête et tous les problèmes qui en découlaient vinrent l‘assaillir, leurs conséquences désastreuses amplifiées par un pouvoir d‘analyse beaucoup trop performant. Il fallait qu’il élimine Kévin au plus vite. Cela dit et avant tout, il fallait aussi éloigner Bison du Voyageur, aussi Nedru concéda qu’il valait mieux ne pas garder un silence obtus;


-Kévin est un Voyageur, il t’a envoûté (avec une facilité déconcertante), et tu t’apprêtais à me tuer. Heureusement, j’ai pu garder le contrôle de mes pensées et nous sortir de là. Mais ne reste pas dans mes pattes, tu ne ferais que me remettre en danger inutilement…

-Certes ! Et un exemple vaut bien mille discours.

Cette voix ! Sale petit con prétentieux ! Kévin avait lui aussi passé les nappes de vapeur, d’un pas lent qui puait l’autosatisfaction et donna la nausée au Gris, fou de rage. Parce qu’impuissant. Tout le corps du jeune homme se figea tandis qu’il frappait dans ses mains en poussant son cri étrange. Cette fois, Nedru sentit son esprit lutter contre des vagues psychiques qui venaient se heurter à la limite de sa conscience, un combat mental qui lui fit souffrir le martyr l’espace de quelques secondes. Puis la douleur laissa la place à un larsen désagréable qui ne l’empêcha pas de voir le colosse qui se jetait à nouveau sur lui.

Il se coula sous un poing jeté avec trop de force mais sa tentative de renverser son adversaire se solda sur un échec. Echec critique même, puisque Bison se retourna dans la fraction de seconde et lui envoya son biceps en pleine face dans une tentative maladroite de corde à linge. Nedru amortit quelque peu l’impact en se jetant en arrière au dernier moment, ce qui eut pour effet de décupler la distance parcourue dans les airs. Il roula aussi gracieusement que son entrainement (et la douleur vive causée par un nez brisé et une épaule démise) le lui permettait, se relevant dans la foulée, prêt à esquiver la prochaine attaque, avec aux yeux une lueur de défi et de sauvagerie qui lui aurait presque donné l’air cool et héroïque pour la première fois de sa vie. Effort vain, gâché par ce à quoi il devait maintenant faire face. Un bison (en minuscule, et donc paradoxalement, ici, l’animal) fou en train de charger. On a du mal à se représenter ce que signifient mille cinq cent livres de muscle et de haine lancé vers soi, mais il est clair que toute lueur de défi disparut instantanément des yeux du Renard à cette vision. Et bordel il voulait ne pas y penser mais il souffrait comme un chien !

Son seul salut, il se l’admit lui-même par la suite, ne fut apporté que par ce que des esprits pathétiques et crédules auraient appelé « la chance » mais résultait tout simplement d’une quantité trop importante de données pour pouvoir être lues correctement. Toujours est-il que, par un reflexe qu’il ne se connaissait pas, son pouvoir prit le relai d’une manière remarquable, presque physique, et minuta avec précision l’instant exact où il devrait se jeter sur le côté pour éviter d’être tué sur le champ par un animal issu d’un autre âge, s’imposant avec une rigueur de vieux général sur chacun de ses muscles qui ne se tendaient plus que pour fuir dans une débâcle qui lui aurait été fatale. Il esquiva, au dernier moment.

Si la « chance » avait existé, peut être que Bison sous sa forme éponyme se serait encastré dans un mur et, pourquoi pas ? en serait mort sur le coup. Hé ! Là, Nedru aurait peut être reconsidéré le concept dans son entier. Mais rien de tel ne se produisit..

Le jeune homme ne perdit pas de temps à prier un miracle. Il estima qu’il avait le temps de tenter quelque chose avant que son quadrupède ennemi ne pivote . Il se jeta sur Kévin pour lui décocher son crochet le plus chargé d’intentions meurtrières à ce jour. Mais même pleine de bonnes intentions, une attaque d’amateur reste vouée à l‘échec face à quelqu‘un de plus expérimenté. Le Voyageur para sans aucune difficulté et riposta sans prendre de risque; il était clair qu’il ne donnait pas son maximum. Il n’avait qu’à gagner du temps, il le savait. Et il en jouait. Ce n’était pas la première fois qu’il utilisait son pouvoir et ses « bersekers » se chargeaient habituellement de se salir les mains à sa place. Malheureusement pour lui, ce qu’il gagnait au combat rapproché, il ne le compensait pas par un esprit brillant.

Nedru resta dos à Bison pendant qu’il esquivait les molles attaques d’un Kévin qui n’attendait que de voir son adversaire se faire écraser par un animal lancé à toute vitesse. Soudain, l’autre Voyageur comprit. Nedru les laissait tous les dans la trajectoire du monstre. Kévin se décala aussi rapidement qu’il pu vers sa gauche pour tenter de se protéger mais Nedru le suivait à la trace, aussi n’eut il d’autre recours que de se jeter de tout son long vers la droite au dernier moment pour éviter Bison. Mais Nedru avait fait de même, les sens plus aiguisés que jamais (exception faite d‘un nez brisé qui ne lui charriant qu‘un flot continu d‘effluves ferreuses). Si le nombre de foulées avait donné une indication assez précise de la distance parcourue aux oreilles de l’analyste attentif (il en avait compté vingt six), l’attitude du Voyageur en face suffit à lui donner le signal de départ. Il ne du pas sa survie à quelque obscur avatar de la chance cette fois, et roula aux côtés de son adversaire tandis que la locomotive de muscle poursuivait sa route sur quelques mètres, s’enfonçant à la limite du nuage de vapeur, presque invisible déjà.

D’un geste, les deux Voyageurs se dressèrent sur leurs pieds, à bonne distance l’un de l’autre, guère tentés par l’idée de se faire piétiner au milieu d’un duel qu’ils ne relancèrent donc pas. Un répit inespéré pour le jeune Renard Gris, dont le bras gauche pendait misérablement, couronné par une auréole hématomique de mauvais augure. Lui et le Faiseur-de-Fous ne pouvaient que se toiser d’un air mauvais, en silence, le jeu étant de devoir paraitre plus maitre de la situation que l’autre. (Ni l’un ni l’autre ne devaient prendre l’avantage ). Des bruits sourds de lutte silencieuse en provenance des geysers prolongèrent la trêve, rendant le silence et l’attente entre les deux opposants plus chargé de sous entendus angoissants encore.. Soudain, une sorte de petit chien surgit de l’obstacle de vapeur. Un coyote en fait.


-On s’occupe de lui, le Voyageur est pour toi ! Vite !

Quel humour !… Il aurait aimé se plaindre mais la lutte qu’il apercevait sur sa gauche ne semblait pas mieux engagée. Le bison tenter de ruer, de se cabrer malgré la présence d’un serpent gigantesque lové autour de lui, tandis que hommes et animaux tentaient de le calmer. Nedru aperçut un éclair de pelage blanc se jeter sur une patte en grognant. Même le loup blessé, qui ne nourrissait apparemment aucune amitié pour Bison, s’était jeté dans la bataille. Bientôt, leur lutte se déplaça en dehors de la brume, vers les deux Voyageurs. Et ils seraient bientôt handicapé dans leurs duels respectifs. L’ours qui se dressait plus loin, notamment, aurait pu les tuer d’une bourrade involontaire. Derrière eux, l’inconnu. Les lueurs bleutées des cristaux n’allaient pas si loin, et après un angle dans la roche l’on devinait que les ombres règneraient une fois de plus. L’analyste avait besoin d’un plan s’il voulait vaincre, aussi prit-il les devants tandis que Kévin regardait la scène avec des yeux dissimulant mal sa surprise. Pourquoi ne les rendait-il pas tous fous ? Parce qu‘il se serait fait mettre en pièce sur le champ, sans nulle doute.

-On prend leur place. Derrière nous, c’est l’arrivée, je suis sûr que tu seras d’accord pour que ne s’y rende pas ensemble.

Du bluff. Mais Kévin marchait; il hocha la tête d’un air mauvais. Ils se déplacèrent donc au milieu des nuages de vapeur d’eau brûlants, ne se distinguant plus qu’assez mal. Un lieu théâtral au possible , idéal pour ce genre d’affrontements. Nedru lui-même en apprécia la saveur en dépit de ce que son caractère habituel pourrait laisser penser. Clars le Faiseur-de-fous ne perdit pas de temps et se jeta sur Nedru, décidé à en finir une bonne fois pour toute, de ces propres mains cette fois. Mais si le jeune homme ne savait pas se battre, il savait comment détruire les assauts d’un assaillant trop impatient par des dizaines de moyens. Il n’eut même pas besoin de son bras gauche pour saisir le poing de son assaillant et, pivotant tout en fléchissant sur ses jambes pour amplifier la force mal dirigée il le fit passer au dessus de lui. Malheureusement, ce ne serait pas assez douloureux. Le Voyageur cracha ce qu’il avait dans les poumons sous le coup de la surprise, quelques vertèbres se remirent en place sous le choc, guère plus.

Alors qu’il s’apprêtait à lui écraser le menton d’un coup de talon furieux, Kévin se remettait déjà et esquivait en roulant.


-T’es pas si nul alors, hein ?

Une insulte qui fit rire Nedru.

- Il faut croire que je suis bon pour envoyer les enfants se coucher.

C’était petit, mais Kévin était plus jeune que lui et malgré une carrure solide, ses traits restaient assez juvéniles. Juste assez pour que sa pique touche. Et Nedru fit mouche.

-T’es un comique non ?

Nedru ne répondit pas mais lui renvoya son sourire narquois habituel, le sourire qui lui avait valu son surnom, un sourire odieux et plein de complaisance. Puis, il s’inclina et fit mine de balayer le sol d’un chapeau invisible. Le rendre furieux. Voilà qui était fait. C’était un début. Seuls à seuls, Kévin ne pourrait envoûter personne pour s’en faire des alliés. La victoire n’était pas acquise, mais les choses se déroulaient sous de meilleures augures.

C’est alors que Kévin utilisa une fois de plus son pouvoir. L’imbécile ! Quel intérêt y avait-il à rendre Nedru plus rapide, plus fort et insensible à la douleur ? Cette fois, il ne frappa pas dans ses mains aussi fort, et son cri s’étrangla dans sa gorge. Le Renard était perplexe. Il ne comprit que lorsque Kévin se jeta sur lui. Il pouvait se lancer son pouvoir sur lui-même !

Et les choses furent vite réglées. L’analyste fit de son mieux, mais il n’était tout simplement pas à la hauteur. Lorsqu’un coup de poing dans l’estomac lui broya les organes, déclarant une hémorragie interne et l’obligeant à se mettre à quatre pattes pour cracher son sang, c‘était fini. Alors qu’il tentait de se relever, son genoux gauche fut réduit en miette, lui arrachant un cri de douleur impossible à contenir. Il rampa pourtant, le cerveau focalisé sur une seule et même idée qui le ferait peut être survivre. Malgré la douleur, son pouvoir fonctionnait encore. Son corps sur le sol ressentait la roche humide mieux qui quiconque. Il avait suffisamment analysé. Il pouvait le faire.


-Et voilà, tu as perdu. Alors, on cherchait Jenny ? Elle est chez moi Jenny, je peux bien te le dire avant de te tuer. Tu vois, je trouvais ça cliché avant, mais faut avouer que ça fait plaisir de pouvoir te fermer ta petite gueule juste avant de te faire la peau. Elle est chez moi ouais. David doit jouer les boucs émissaires. Tu connais David ? T’as l’air d’avoir bien fait ton boulot, tu dois en avoir entendu parler.. Jenny a fait les choses comme il fallait pour qu‘on aille l‘emmerder, et on trouvera plein de traces d‘elle chez lui en fouillant un peu. Et toi, tu te souviendras pas de tout ça… Ca te fait quoi ?

-…

-Tu te tais hein, t’as à peine la force de ramper… Bordel, c’est trop fort ça ! On t’envoie directement du monde réel quand même ! Si ça se trouve, demain je vais te croiser dans la rue, tu me feras ton sourire à la con, et moi je pourrais penser « tu sais quoi, je t’ai buté sale petite merde ». LE PIED !


Exulte encore juste un peu… Nedru s’arrêta finalement et se coucha sur le dos, face à Kévin.

-T’en peux plus ? Je te comprend, va. Je suis venu ici chercher un artefact, c’était pas très dur, mais trop pour un naze comme toi. D’ailleurs, bon, je me réveille dans pas très longtemps alors il va falloir abréger.

Nedru articula péniblement;

-Q.. tu ..ches qu….. ch.se ……jet .. Jenny.

-Ahahaha ! Quoi ? Moi pas comprendre ! Tu parles de Jenny ? T’as un secret ?

Il se pencha au dessus du Gris, tenant son oreille dans le creux de sa main, hilare. Paradoxalement, il n’entendit jamais le jet du geyser qui s’engouffra dans ses canaux auditifs et lui brûla plus que sévèrement la moitié du visage. Il était trop occupé à hurler pour entendre Nedru lorsque celui-ci se redressa sur les mains et lui expliqua à son tour les raisons de son échec d’une voix éteinte. Mais très bien articulée.

-Pour ma part, je te la fait brève; ces geysers ont des cycles d’activités réguliers, et quand je suis contre le sol, je peux savoir précisément quand et où l’eau va jaillir… Grâce à toi et la partie de cache-cache que tu m’as organisée ! Il toussa un peu de sang avant de poursuivre. Mais moi, je ne suis pas pressé par un artefact, restons ensemble jusqu’au bout.

Il se traîna jusqu’à Kévin et plaqua son visage contre l’ouverture du geyser le plus proche, s’asseyant lourdement sur le torse du Voyageur. Aucun coup de poing n’aurait pu le déloger, aucune ruade le désarçonner. Et Kévin était devenu extrêmement faible. Le fait qu’il soit encore en vie relevait du miracle. Le second jet de vapeur ne lui laissa cependant pas le temps de souffrir et le fit disparaitre dans un puissant nuage de fumée mêlé de vapeur. Ce qui fit tomber le Renard de quelques centimètres et lui arracha un nouveau cri lorsque son genoux toucha le sol. Si on ne pouvait plus se reposer sur la dépouille encore chaude de son ennemi !

Et maintenant quoi ? Jenny était retrouvée. Même avant le monologue final de méchant (cliché et mauvais, quoi qu’en ai pensé Kévin) , la messe avait été dite. Et David devait servir de bouc émissaire. D’où un journal intime si bref, tenu en des termes si tapageurs et adressés plus à d‘autres qu‘à soit. D’où des discussions à mi-mot avec Clars sur les réseaux sociaux tandis qu’avec Eddinks tout était transparent. C’était simple, c’était fini. En temps et en heures. Comme prévu.

Et maintenant quoi ? Nedru avait le nez brisé, un genoux en miette et une hémorragie interne. Son épaule gauche, il ne la sentait plus et ne pouvait pas s’en plaindre même s’il était bien obligé de l’ajouter du côté des pertes.

Et maintenant, quoi ? Inutile de continuer l’épreuve. Ce n’était qu’un prétexte. Ceux qui l’observaient avaient dû s’en rendre compte. Il ne gagnerait rien à continuer. Il lui fallait simplement rester ici, et survivre jusqu’au réveil. Comme le loup blanc une éternité plus tôt, il s’immobilisa lentement, plaçant chacun de ses membres et organes meurtris dans une position qu’ils pourraient supporter. Il ne devait pas fermer les yeux. Simplement.
Il s’en sortirai.

Une main le rattrapa doucement alors qu’il tombait sur le sol. Ses yeux s’ouvrirent sur un sourire. Pourquoi diable les avaient-ils fermés ?


-Tiens bon. Quand Bison est redevenu normal, on a compris. Beau travail. Tu as mérité de voir le bout.

Nedru cracha probablement une insulte alors qu’on le soulevait du sol. La douleur qui se réveilla soudain était horrible. Il entendit ses sauveurs commenter son état, mi moqueurs, mi respectueux. Le Gris ne prit pas la peine de lever les yeux vers eux. Il se laissa porter. Il sentit qu’ils descendaient, tournaient quelque peu, que la chaleur devenait plus intense, mais c’était tout. Il ne pouvait pas se débattre de toute façon. Ils étaient nombreux, et avaient fait jeu égal avec un bison à la force décuplée et rendu insensible à la douleur… S’il avait pu parler, il aurait pu tenter de se défendre par les mots, mais il n’en avait plus la force. Le voyage ne dura pas plus d’une dizaine de minutes, et à un rythme particulièrement lent encore.

On le déposa précautionneusement sur le sol. Il ouvrit ses yeux sur une sorte de caverne infernale, où se devinaient des coulées de magma, ça et là. Par reflexe, son pouvoir lui apprit que cela expliquait probablement la présence de geysers plus haut. Il l’envoya se faire foutre mentalement. Quelqu’un lui adressait la parole, mais il ne devait jamais réussir à lever les yeux sur son visage.


-Tu n’est pas venu ici pour montrer ta bravoure, Voyageur. Des intérêts qui ne nous concernent pas te guidaient…

Un silence.

-Et pourtant…tu as montré ta bravoure. Tu as traversé le labyrinthe avec une facilité remarquable. Combattu seul la taupe d’épines pour permettre aux autres de fuir. Affronté ton comparse et vaincu. Car… Hum, oui ! Il a été jugé que le coup de grâce qui aurait pu te disqualifier n’a pas été porté par ta main. Jugement quelque peu discutable, mais dicté par le fait que jamais nous ne t’avons vu utiliser ton pouvoir. Ton sens de l’honneur est impressionnant. Peut être n’a-tu aucun pouvoir ? Alors, ton mérite n’en est que plus grand.

S’il avait pu rire, Nedru l’aurait fait. Son sens de l’honneur ! Un pouvoir plus subtil que celui de ces Contrôleurs tape à l’œil, voilà tout. Et on allait le récompenser ? Ridicule ! A leurs yeux, il avait peut être sauvé Bison. Il leur avait empêché de se salir les mains. C’était la seule raison valable. Il sentit qu’on lui mettait quelque chose dans la main.

-Voilà ta récompense. Dors maintenant, comme tu ne dors plus.

Et le Clever Fox ferma les yeux.

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Nedru Etol
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MessageSujet: Re: Où est Jenny ? [quête solo terminée] Où est Jenny ? [quête solo terminée] EmptyVen 14 Sep 2012 - 1:06
Le jeune homme ouvrit les yeux sur son plafond blanc, un sourire paisible se dessinant sur son visage. Il se souvenait de cette nuit. Il avait le temps. Il croisa les mains sous sa tête sans prendre la peine de se masser le visage, pour profiter de cet instant jusqu’à ce qu’il perde de sa saveur. Comme quelqu’un qui a fait de beaux rêves.

Il mit de l’ordre dans ses pensées, s’organisa un début de journée paisible pour laisser à son esprit le loisir de vagabonder de temps en temps, puis se massa vivement le visage avant de se lever. Ridicule ! Il sourit en constant cette poussée de sentimentalisme et se mit au travail.

Quelques heures plus tard, il était installé au face du café où il avait donné rendez vous à David. Il avait rassemblé les quelques renseignements qui lui seraient nécessaire; l’adresse de Kévin Clars, une photo de l’individu, un numéro de téléphone, ainsi que quelques informations complémentaires qu’il avait grappillé ici et là. Comme convenu, il n’avait à fournir aucune explication supplémentaire; ni le fait qu’ils souhaitaient faire accuser David, ni que Jenny y était de son plein grès (probablement au milieu de draps souillés). Et s’il soignait quelques fois ses clients, il ne jugea pas la chose nécessaire concernant Eddinks. Il ne le rappellerai probablement jamais.

Il ne lui restait plus qu’à attendre, lui qui était venu sur place deux heures plus tôt pour s’assurer que David viendrait seul. Dissimulé sous une capuche discrète et une écharpe légère, lunettes de soleil vissées sur le nez, il resta assit dans un coin et mangea une collation locale en parcourant des yeux le journal, guettant du coin de l’œil l’arrivée de chaque nouvel arrivant.

Mais David n’avait pas la trempe pour tenter de le doubler, apparemment. Ou alors, il s’y était bien prit; lorsqu’il arriva enfin dans le café, il était seul. Aucun regard de complicité avec l’un des occupants du lieu; il ne jeta que de simples regards à la ronde mais glissa sur le journal de Nedru. Le Renard Gris termina ses œufs, enfila ses gants et saisit l’enveloppe qu’il avait préparé. Il la posa sur la table de David sans dire un mot, et David lui en tendit une jumelle en tremblant légèrement. Rien de plus. Nedru quitta l’endroit et s’enfonça dans des ruelles uniquement fréquentées par les gens de son espèce sans rien ajouter. Il ne reverrai jamais ce David.

Il rentra chez lui après maints détours et, après avoir vérifié que l’argent était correct, il s’autorisa une journée de relaxation -par ailleurs nécessaire.

Il avait terminé une affaire lucrative. D’autres étaient en cours. C’était tout.

Peu après, il alla trouver Kévin. Pour le plaisir de lui sourire.




~~Deux mois plus tard~~

-Allô ?
-Jenny ? C’est moi.
-Ah ! Enfin ! Tu vas bien ?
-Très bien. Toi, tu te sens comment ?
-Ca va.. Grâce à toi ! Et j’ai encore rêvé de toi ! C’est dingue non ? Tu y crois aux médiums ? Ou ce genre de trucs ?
-Je ne sais pas… Mais je te crois ! C’est incroyable !..
-Attends… OUI ?! OKAY ! CA VA !! Je dois te laisser. Je peux même plus téléphoner...

...

Mais tu m’a changée tu sais ? Bon, j’y vais… Merci. A plus tard.

-Ca m’a fait plaisir de t’entendre.

Le combiné claqua. Nedru passa rapidement sa langue sur ses canines, tranchantes. Il se délectait déjà du moment où il la briserai. Juste après un mauvais rêve. Il lui conseillerai une boite de somnifères.
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Où est Jenny ? [quête solo terminée]

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